« Il semble peu probable que Netanyahu et Herzog aient écouté De Croo »

Bonjour Jeroen, pourquoi De Croo est-il au Moyen-Orient ?

«De Croo, qui voyage avec son homologue espagnol Pedro Sánchez, espère avant tout être une ‘voix de la raison’ en Israël. Il ne nie pas l’horreur de l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre. Il a pu le constater de ses propres yeux cet après-midi dans le kibboutz Be’eri, complètement détruit. Mais pour De Croo, cela ne justifie pas la guerre à grande échelle à Gaza et les innombrables morts civiles palestiniennes. Il souligne régulièrement que nous « ne voulons pas encore dix mille morts ».

« De Croo et Sánchez ont un poids symbolique à porter. L’Espagne est actuellement présidente du Conseil européen. Une position stratégique est celle à partir de laquelle un État membre peut diriger la politique européenne. La Belgique assumera ce rôle à partir de janvier. En se présentant désormais en duo à Jérusalem, De Croo et Sánchez incarnent la continuité. Ce n’est pas sans importance étant donné les divisions européennes sur la guerre à Gaza.»

À qui De Croo a-t-il déjà parlé ?

« Lors de ses réunions avec le président Yitzhak Herzog et le Premier ministre Benjamin Netanyahu ce matin, De Croo a déclaré qu’Israël avait le droit de se défendre contre le groupe terroriste Hamas, mais qu’il y avait actuellement beaucoup trop de morts civiles à Gaza. La presse n’était pas autorisée à assister à ces réunions. Même après, ni Herzog ni Netanyahu ne sont apparus. Le Premier ministre israélien accorde presque exclusivement des interviews aux principaux médias américains, pour s’assurer que les États-Unis restent à ses côtés.

« De Croo espère que la rupture imminente des combats entre Israël et le Hamas pourra être le début d’une désescalade. Normalement, cette pause commence demain matin, mais il n’y a pas encore de certitude. Le Premier ministre dit déjà qu’il ne faut pas manquer cette opportunité.»

Herzog et Netanyahu ont-ils écouté De Croo, à votre avis ?

« Honnêtement : cela ne semble pas très probable. Lors de sa rencontre avec Herzog, le Premier ministre aurait déclaré qu’une démocratie comme Israël devait au moins essayer de respecter autant que possible le droit international. Herzog, pourtant au profil plutôt modéré, aurait répondu que l’Occident n’avait pas de leçons à donner à son pays. « Ou les Américains et les Britanniques n’ont-ils pas bombardé l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale ? » Cela en dit long sur l’état d’esprit.

« Autre exemple : avant sa conversation avec Netanyahu au parlement israélien, De Croo a vu une vidéo d’une demi-heure avec d’horribles images de caméras corporelles de combattants du Hamas et de travailleurs humanitaires israéliens le 7 octobre. Le ton était ainsi donné. Israël ne semble pas avoir l’intention d’arrêter la guerre avant longtemps. Quoi qu’il en soit, il n’y a toujours pas de plan d’avenir pour Gaza. »

Et cette pause du combat maintenant ?

« Il faut donc que ça commence demain matin, pour quatre jours. Mais De Croo espère que les armes resteront silencieuses plus longtemps.

«L’accord sur la pause dans les combats, tel qu’il a été élaboré mardi, offre des opportunités. Il est basé sur le concept « plus c’est plus » : plus le Hamas libère d’otages israéliens, plus les bombardements israéliens sur Gaza cesseront de jours et plus de prisonniers palestiniens pourront être échangés. L’accord prévoit actuellement l’échange de 50 otages contre 100 prisonniers palestiniens en Israël, principalement des femmes et des jeunes. Mais Israël dispose déjà d’une liste d’environ 300 noms. De Croo y voit une (petite) ouverture pour un cessez-le-feu à long terme.»

De Croo milite-t-il pour une solution à deux États en Israël ?

« De Croo sait que tout le monde à Jérusalem n’est pas intéressé par l’opinion de la Belgique et/ou de l’Europe. C’est pourquoi il essaie de maintenir l’Église diplomatique au milieu. Par exemple sur la solution à deux États. Selon lui, cela semble effectivement être la seule solution durable pour Israël et la Palestine, mais il se rend compte qu’il existe encore de nombreux « obstacles » sur le chemin. Selon De Croo, il est désormais temps de réfléchir à « un processus » pour ces négociations difficiles.

«L’Europe peut être un partenaire dans ce domaine, selon De Croo, mais en fin de compte, cela devra venir des pays du Moyen-Orient eux-mêmes et des puissances géopolitiques de cette planète. Cela concerne principalement les États-Unis et la Chine.

« De Croo se positionne depuis longtemps, en Europe et dans le monde, comme une voix modérée dans cette guerre. Malgré des débats houleux au sein du gouvernement fédéral, il maintient une ligne assez droite depuis le 7 octobre. La Belgique a toujours dénoncé la mort de civils innocents des deux côtés du conflit et exigé le respect du droit international. Malheureusement, ni le groupe terroriste Hamas ni Israël n’y ont adhéré.»

De Croo parle-t-il aussi aux Palestiniens ?

« Oui, et c’est symboliquement important. Surtout après la visite très unilatérale et donc très critiquée de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en Israël. De Croo et Sánchez veulent clairement entendre les deux côtés.

«Avec Sánchez, De Croo a rencontré ce soir Mahmoud Abbas, le président – quoique affaibli – de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie. Abbas a condamné les attaques terroristes du Hamas et a indiqué qu’il souhaitait, entre autres, de nouvelles élections prochainement. De Croo y voit un signe encourageant montrant que l’Autorité palestinienne comprend qu’elle est prête à jouer un rôle dans le processus de paix.

« Une rencontre avec le président égyptien Abdul Fatah al-Sisi est prévue demain au Caire. En tant que pays voisin, l’Égypte joue un rôle important dans les pourparlers en cours entre le Hamas et Israël. De Croo se rendra également au poste frontière de Rafah. C’est actuellement la seule porte d’entrée vers Gaza assiégée et donc le point par lequel doit passer toute l’aide humanitaire.

« De Croo a exhorté Herzog et Netanyahu à ouvrir davantage de postes frontières pour assurer, entre autres, l’approvisionnement en carburant et en eau de la population palestinienne. Mais là aussi, la pétition semble pour l’instant nulle et non avenue.»



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