Ger Luijten : un rare connaisseur enthousiaste du dessin et de l’imprimerie


Lors d’un séjour aux Pays-Bas, l’historien de l’art Ger Luijten, directeur du Fondation Custodia à Paris. Il est décédé subitement d’une crise cardiaque à l’âge de 66 ans. La Fondation Custodia l’a annoncé mardi. Luijten est à la tête de l’institution depuis 2010, qui gère et présente la collection d’art mondialement connue du collectionneur néerlandais Frits Lugt (1884-1970).

Sous la direction de Luijten, la Fondation Custodia est passée au cours de la dernière décennie d’une collection d’étude assez fermée à une « maison de l’art sur papier » très accessible, comme il l’appelait lui-même.

En ce moment, les salles d’exposition de la rue de Lille accueillent deux expositions initiées par lui, une sélection de dessins français du XIXe siècle de sa propre collection et un aperçu des dessins et aquarelles de Léon Bonvin (1834-1866), relativement artiste français méconnu qui, grâce aux efforts de Luijten et de ses conservateurs, est désormais fermement inscrit sur la carte de l’histoire de l’art. Un catalogue raisonné de l’œuvre de Bonvin a également été publié pour accompagner la dernière exposition.

Acquisitions

Les expositions actuelles sont révélatrices de ce que Luijten, dont la grande connaissance était accompagnée d’un rare enthousiasme contagieux, considérait comme la tâche de la Fondation Custodia : mener une recherche approfondie en histoire de l’art et ensuite présenter cette recherche à un large public dans des expositions et des livres attrayants. .

Lors de la fermeture fin 2013 de l’Institut Néerlandais – l’institut culturel néerlandais en France installé dans un bâtiment de la Fondation depuis plus de cinquante ans -, Luijten a décidé de ne pas céder l’espace vacant près de l’Assemblée Nationale au gouvernement ou à un ambassade pour beaucoup d’argent, le louer, mais continuer à l’utiliser pour l’art, désormais sous le drapeau de la Fondation Custodia elle-même. Il a entièrement rénové et modernisé à la fois le bâtiment d’exposition côté rue et le logement du XVIIIe siècle de la collection Frits Lugt derrière celui-ci.

Le programme de l’exposition était toujours en adéquation avec la collection : par exemple, des dessins anciens de la collection étaient combinés avec des dessins apparentés d’autres musées ou, dans l’exposition Dessins pour la peinture au temps de Rembrandt (2016), avec les peintures pour lesquelles elles constituaient une étude.

Parce que les dessins du calibre que Frits Lugt collectionnait dans la première moitié du XXe siècle – les Rembrandt et les Michel-Ange – n’ont plus de prix, Luijten a décidé de prendre une autre direction lors de l’élargissement de la collection. Ces dernières années, il a réussi à ajouter de nombreuses belles acquisitions à la sous-collection d’esquisses à l’huile du XIXe siècle.

Les études à l’huile au XIXe siècle remplissaient la même fonction que les dessins des siècles précédents : elles précédaient les œuvres d’art officielles et donnaient donc un aperçu de la pensée et de l’expérimentation d’un artiste. Une sélection de la collection en croissance rapide de croquis à l’huile – qui, grâce à Luijten, comprend désormais des œuvres de Constable, Degas, Delacroix et Corot, entre autres – a été présentée à Paris l’hiver dernier en combinaison avec des études à l’huile comparables du Fitzwilliam Museum de Cambridge et la National Gallery of Art de Washington.

Boijmans et Rijksmuseum

Des expositions aussi prestigieuses auraient été inconcevables sans les nombreux bons et souvent amicaux contacts de Luijten dans le monde international des musées. Sa direction à Paris est le couronnement d’un palmarès déjà impressionnant. Dans les années 1980, il travaille au Museum Boijmans van Beuningen de Rotterdam et de 1990 à 2010 au Rijksmuseum d’Amsterdam, où il dirige depuis 2001 le Rijksprentenkabinet, le département d’art sur papier.

Là, il a généreusement acquis de l’art hollandais d’après la Seconde Guerre mondiale, que le Rijksmuseum avait précédemment collectionné jusqu’en 1940 environ. Luijten pensait que la gravure et le dessin du XXe siècle devaient être acquis « non pas de manière monotone », mais « dans toute leur ampleur » : Mondrian et Armando devaient être représentés, mais aussi des dessinateurs figuratifs moins connus. Et des illustrateurs comme Peter van Straaten et Dick Bruna.

« Ne prenez pas parti, comme le font les musées de la ville pour l’art moderne, mais collectez généreusement le meilleur, de toutes parts », résumait-il la politique en 2010. CNRC. « Afin que les générations futures puissent déterminer encore et encore ce qu’elles trouvent le plus intéressant ou important. »

Parallèlement à des expositions d’art ancien sur papier, Luijten montrait régulièrement à la Fondation Custodia des travaux de dessinateurs et graphistes contemporains, pour souligner que le travail se perpétue à ce jour dans la tradition des maîtres anciens que collectionnait Frits Lugt. Luijten espérait rester directeur jusqu’à son soixante-dixième anniversaire. Sa tête était encore pleine de projets d’expositions et de livres. Il a vécu avec l’art et a généreusement permis aux autres de partager cette vie.

Il vivait avec sa femme et son jeune fils dans la maison du directeur au-dessus de la Fondation et tous ceux qui se trouvaient dans le quartier – amis, connaissances et même amis d’amis – pouvaient compter sur une visite personnelle des expositions et du musée s’il était chez lui et dépôt de dessins et murs avec croquis à l’huile. Aussi le dimanche. Frits Lugt aurait été ravi d’avoir un successeur aussi dévoué. Il va maintenant être difficile pour la Fondation Custodia de trouver un successeur à Ger Luijten.

Lire aussi : « Le conservateur ne suit pas les problèmes du jour »



ttn-fr-33