Freuler et Vargas, l’étrange couple qui a éliminé l’Italie et fait rêver la Suisse


Les Suisses se sont qualifiés pour les quarts de finale de l’Euro2024 en battant les Azzurri avec une excellente performance : grâce aux buts de Remo et Ruben

De notre correspondant Francesco Pietrella

30 juin – 00h32 – BERLIN, ALLEMAGNE)

Les familles de Remo Freuler et Ruben Vargas se tiennent fières et souriantes à l’ombre des deux tours de l’Olympiastadion de Berlin. Ils émergent de l’escalier de marbre blanc qui mène à la tribune VIP et sont applaudis par la marée rouge qui vient de quitter l’établissement. D’ailleurs, ils se reconnaissent immédiatement : ils portent tous les mêmes t-shirts, avec leurs noms et numéros bien visibles, 8 et 17. L' »équipage Vargas » – au moins cinq personnes – n’a qu’un seul meneur : Fabienne Della Giacoma, la mère d’un garçon qui avait un compte ouvert avec le destin. En 2021, lors des quarts de finale contre l’Espagne, il décoche le penalty décisif dans les étoiles puis fond en larmes, entouré de ses coéquipiers. Sa mère, une ancienne promesse de gymnastique artistique aux origines italiennes évidentes, a déclaré qu’elle pleurait avec lui. Aujourd’hui, elle aura été plus heureuse que son fils, qui a marqué avec un but du haut du 2-0 qui nous a évincé des quarts de finale : un tir du pied droit au deuxième poteau et Gigio battu.

L’ARCHITECTE REMO

Si la Suisse a atteint les quarts de finale, elle le doit aussi à l’étrange couple Freuler-Vargas, deux garçons différents unis par un même destin : construire de nouveaux souvenirs pour les générations à venir. Remo n’est pas une surprise. C’est l’une des briques sur lesquelles Gasperini a construit le conte de fées de l’Atalanta, alors que cette année il a entraîné Bologne en Ligue des champions. On le qualifie de « grégaire » parce que son nom ne fait pas la Une, mais il joue comme il a vécu toute sa vie : franc, direct, essentiel. C’est juste trop. Avant de défier les Azzurri, il a lancé une fléchette, rappelant à son Italie que cette défaite 3-0 au Championnat d’Europe lui fait encore très mal, mais que les portes de la Coupe du Monde restent fermées. « Après tout, nous y sommes allés… ». Freuler s’est immédiatement excusé, mais samedi, il a tiré une autre flèche directement dans le cœur. Le pied gauche avec lequel il a percé Donnarumma est né dans la deuxième équipe de Winterthur, en sixième série, devant les Grasshoppers, Lucerna et aussi l’Atalanta. Lors de son passage en zone mixte, il affichait un grand sourire comme celui-ci : « On savait qu’il fallait courir le ballon, on a bien fait de prendre l’avantage avant la fin de la première mi-temps. Quand l’équipe tourne, il n’y a pas grand-chose à faire. » Freuler faisait partie des contes de fées. D’abord la Déesse, puis Bologne, maintenant la Suisse. Qui sait comment cela va se terminer.

VARGAS, ET LE BASEBALL ?

L’histoire de Vargas est un peu différente. En attendant, cela commence à Saint-Domingue, sur la mer et non dans les montagnes. Son père, un vieux talent de baseball avec un assez bon swing, est originaire de la République Dominicaine. A l’âge d’une trentaine d’années, il rencontre sa mère puis s’installe en Suisse. Ruben est né et a grandi à Adligenswil, une ville de six mille habitants célèbre pour deux choses : une vieille église du XIIIe siècle et Stephan Lichtsteiner, l’arrière latéral qui a disputé 108 matches avec la Suisse. Vargas a grandi avec « une batte de baseball à côté du lit pour faire plaisir à son père », qui au fond y croyait, mais les après-midi ensoleillés, il descendait dans la rue avec le ballon. Et il est resté là. « Si j’avais continué, j’aurais dû aller jouer aux Etats-Unis, mais j’étais plus doué dans le football. » Ce qui est bien, c’est que Ruben est aussi bon en tant que peintre. Avant de signer son premier contrat professionnel, il aimait peindre, et ce n’était pas mal. Après chaque séance de formation, il prenait une nouvelle palette et commençait à composer la toile. «J’ai aussi passé plusieurs tests pendant mes études.» Promu, mais meilleur football. Et derrière le but contre l’Italie, il y a aussi un peu de cabale : Vargas joue en Allemagne depuis 2019, a marqué 22 buts pour Augsbourg, mais n’a jamais marqué à l’Olympiastadion. En effet, en quatre matches à l’extérieur contre le Hertha, ils n’avaient réussi qu’un match nul. Cette fois, ça s’est mieux passé. Tir du pied droit, ballon dans la lucarne et huitième but de l’équipe nationale. Adieu le baseball.





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