Encore victime de lèse-majesté thaïlandaise : deux ans de prison pour un canard gonflable jaune « offensant »


En Thaïlande, la discussion autour d’une loi controversée sur la lèse-majesté a de nouveau éclaté avec la condamnation cette semaine d’un homme de 26 ans. Il a été condamné à deux ans de prison pour avoir tenté de vendre des calendriers satiriques avec des images de canards gonflables jaunes.

La loi thaïlandaise de lèse-majesté, critiquée par les organisations de défense des droits de l’homme – car extrêmement stricte – en main, a jugé qu’il y avait eu moquerie inadmissible à l’égard de la famille royale.

Au cours de l’affaire de six jours contre l’homme, un huissier surnommé « Tonmai », l’accusation a trouvé plusieurs illustrations de canards sur le calendrier insultant le roi Maha Vajiralongkorn Bodindradebayavarangkun, ou Rama X en abrégé.

Canard en avion VIP

Non pas que le monarque ressemble à un canard, mais les scènes dans lesquelles les canards sont apparus pourraient faire référence au mode de vie du monarque. Par exemple, il y avait un canard qui volait dans un avion VIP tandis que deux autres canards marchaient docilement à côté de lui. Il y avait aussi les chiens nécessaires autour des canards. Les chiens feraient référence à des personnes fidèles à la famille royale.

Les gens passent devant un portrait du roi Maha Vajiralongkorn Bodindradebayavarangkun à Bangkok. © ANP/EPA

Pas d’imitation

L’avocat de Tonmai a déclaré que le canard de son client n’était en aucun cas destiné à imiter le roi, mais que la pierre d’achoppement jaune apparente était censée représenter le fabricant lui-même. Le journal thaïlandais ‘Thai Enquirer’ a rapporté que Tonmai serait en fait condamné à trois ans de prison, mais que le juge – en raison de son attitude coopérative pendant l’enquête – a finalement voulu prendre une année sabbatique.

Tonmai n’est pas le seul touché. Au moins 1 890 personnes, dont 284 jeunes de moins de 18 ans, ont été inculpées en Thaïlande en vertu de lois enfreintes. Ceci après que les autorités ont réprimé les manifestations de masse dirigées par des jeunes qui ont commencé en juillet 2020. Plus de 200 personnes ont été emprisonnées en vertu de l’article 112 du Code pénal thaïlandais. Il comprend des peines allant de trois à 15 ans de prison pour toute personne reconnue coupable de diffamation contre le roi et d’autres membres de la famille royale.

Les canards se présentent lors des manifestations de 2020 en Thaïlande.
Les canards se présentent lors des manifestations de 2020 en Thaïlande. ©AFP

Symbole de résistance

La sensibilité autour des canetons jaunes n’est pas accidentelle. Le canard gonflable jaune est un symbole du mouvement pro-démocratie, qui s’oppose également à la monarchie. Lors des manifestations de 2020 en Thaïlande, les manifestants ont été aspergés de canons à eau et tirés avec des gaz lacrymogènes. Ils ont ensuite utilisé des canards gonflables en plastique pour se protéger. Dans les manifestations qui suivirent, les canards devinrent de plus en plus un symbole de résistance.

Grève de la faim

Selon l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch (HRW), les autorités thaïlandaises veulent désormais punir sévèrement toute expression qui aurait même des relents d’insulte possible envers le monarque.

Les canards se présentent lors des manifestations de 2020 en Thaïlande.
Les canards se présentent lors des manifestations de 2020 en Thaïlande. ©AFP

Parmi les nombreuses protestations contre la loi, il y a aussi celle de deux jeunes femmes thaïlandaises qui se sont retrouvées en prison parce qu’elles ont écrit que les mouvements royaux à travers la ville avec un cortège de voitures causaient des nuisances. Les désormais populaires Tantawan Tuatulanon (21 ans) et Orrawan Phoopong (23 ans) sont en grève de la faim depuis le 18 janvier et exigent une réforme de la loi.



ttn-fr-34