Célébrant le 350e anniversaire de Pierre le Grand, le président russe Vladimir Poutine a comparé son opération militaire en Ukraine à la guerre du tsar contre la Suède. Cela rend le fossé avec l’Occident presque infranchissable.

Bert Lanting11 juin 202212:13

« Il ne leur a rien pris, il a repris (ce qui appartenait à la Russie) », a déclaré Poutine lors de l’ouverture de l’exposition. Pierre le Grand, la naissance d’un empire† Souriant, il ajouta : « De toute évidence, nous avons également reçu la tâche de reprendre (ce qui était à nous) et de le renforcer. » Selon lui, la Russie réussira aussi « si nous partons de ces valeurs essentielles qui sont à la base de notre existence ».

C’était une effusion qui a sapé l’affirmation du président russe selon laquelle tout le conflit sur l’Ukraine avait été causé par l’échec de l’Occident à tenir sa promesse de ne pas étendre l’OTAN à la Russie.

Le passé impérial russe

Poutine avait précédemment indiqué qu’il ne reconnaissait pas l’Ukraine, qui a déclaré son indépendance après la chute du régime soviétique en 1991, comme un véritable pays. Dans un long tract l’année dernière, il a soutenu que les Russes et les Ukrainiens forment une seule nation et que l’Ukraine était une construction artificielle. La plus grande erreur a été que Vladimir Lénine a donné aux républiques soviétiques (sur papier) le droit de faire sécession, selon Poutine une « bombe à retardement dangereuse » qui a explosé lorsque le parti communiste a perdu le pouvoir.

L’idée de Poutine selon laquelle il a non seulement la tâche sacrée mais aussi le droit de « reprendre les territoires traditionnellement russes » montre que les anciennes républiques soviétiques, comme les pays baltes, avaient toutes les raisons de chercher la protection de l’Occident. Cela soulève également la question de savoir si l’OTAN aurait pu satisfaire la faim revancharde de Poutine avec la garantie que l’Ukraine ne rejoindrait jamais l’alliance. Compte tenu de son obsession pour le passé impérial, c’est hautement improbable.

Avec son retour à l’époque du tsar Pierre le Grand, Poutine jette effectivement par-dessus bord tout le droit international moderne, en mettant l’accent sur la souveraineté et l’inviolabilité des frontières. La Russie elle-même détermine à quels territoires étrangers ce « droit » appartient.

Poutine contre Pierre

Narva (aujourd’hui l’Estonie), Reval (aujourd’hui Tallinn) et Riga (la capitale de la Lettonie) ont été parmi les premières villes à être capturées par les forces du tsar Pierre lors de la campagne de 21 ans contre le roi de Suède Charles XII, lui-même un incorrigible bagarreur. Alors Poutine a-t-il le droit de ramener les pays baltes sous le contrôle de Moscou ? Et où s’arrêtent les revendications historiques russes ? Sous Catherine la Grande, la Moldavie appartenait aussi en partie à la Russie.

En s’alignant sur Pierre le Grand, Poutine espère capitaliser sur la popularité dont jouit encore le tsar auprès des Russes. Mais la question est de savoir s’il s’est rendu service avec sa comparaison entre la guerre nordique du tsar Pierre et la guerre contre l’Ukraine. Récemment, le bloc occidental, qui constituait initialement un seul homme derrière l’Ukraine, a commencé à montrer des fissures. Certains pays ont prudemment commencé à parler de la nécessité d’une trêve (principalement pour limiter les dommages économiques causés à l’intérieur du pays par la hausse des prix du pétrole et du gaz).

Ces appels à un compromis deviennent très difficiles à soutenir, maintenant que Poutine montre ouvertement une fois de plus qu’il se soucie du retour « légal » des terres historiques à la Russie. Ce faisant, il a exclu la possibilité d’un cessez-le-feu, sans parler d’un accord de paix.

Écart infranchissable

Les critiques en Russie ont donc gentiment rappelé que la comparaison de Poutine avec son grand exemple est erronée. Pierre le Grand a fondé Saint-Pétersbourg en 1703 comme une « fenêtre sur l’Occident », mais Poutine est occupé à refermer cette fenêtre, a-t-il déclaré sur les réseaux sociaux en Russie. La guerre de Poutine, qui ne peut pas être qualifiée de guerre, a rendu le fossé avec l’Occident presque infranchissable.

Que le Kremlin ne soit pas intéressé par de véritables négociations avec Kiev ressort clairement des préparatifs que les autorités « militaro-civiles » installées par la Russie dans les territoires occupés font pour rejoindre la Russie. Les autorités pro-russes ont annoncé la semaine dernière en grande pompe que les liaisons ferroviaires et l’autoroute terrestre reliant la Russie à la Crimée avaient été entièrement restaurées.

L’approvisionnement en eau de la Crimée asséchée via un canal du Dniepr, qui a été fermé par les Ukrainiens après l’annexion de la péninsule par la Russie, est également de nouveau utilisé.

Il est clair que la Russie ne cédera plus cette bande le long de la côte sud. Selon le site d’information russe meduza.io, qui opère depuis Riga, le Kremlin a déjà nommé un haut responsable expérimenté pour organiser un référendum sur l’affiliation dans les régions occupées. Après cela, ils peuvent ensuite être annexés par la Russie, apparemment à la demande des résidents.



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