En Europe, nous avons appris qu’une guerre désastreuse peut aussi éclater « accidentellement »

Jeroen Van Horenbeek est journaliste à Le matin.

Jeroen Van Horenbeek

Une proposition circule au sein du gouvernement israélien visant à expulser de force les résidents palestiniens de la bande de Gaza vers le désert du Sinaï en Égypte. Des camps de tentes devraient y être construits pour les réfugiés, qui pourraient ensuite devenir de nouvelles villes.

C’est une proposition méprisable.

Depuis des semaines, la question se pose de savoir quel avenir Israël envisage pour les habitants de la bande de Gaza après la destruction promise du groupe terroriste Hamas. (Ils sont 2 millions, dont la moitié sont des enfants.) On comprend maintenant pourquoi cette question n’a pas encore reçu de réponse. L’une des options consiste à les conduire dans le désert.

La proposition d’une expulsion forcée montre à quelle vitesse et à quel point la pensée israélienne évolue au lendemain du 7 octobre. L’attaque du Hamas a ouvert la blessure de l’Holocauste dans le monde juif. Le gouvernement israélien est désormais déterminé à offrir à nouveau à sa population un foyer sûr.

Il apparaît immédiatement clairement que la guerre actuelle entre Israël et le Hamas est bien plus qu’un simple conflit de plus dans une région en feu depuis des décennies. C’est une bataille dans laquelle la fin justifie les moyens pour Israël.

L’une des conséquences de cette situation est que le spectre d’une guerre à grande échelle continue de planer sur le Moyen-Orient. Alors que les roquettes israéliennes réduisent la bande de Gaza en ruines, les pays voisins regardent avec les mains tordues. Le régime islamique iranien, considéré comme le principal allié du Hamas, est en tête.

La question reste de savoir combien de temps la diplomatie et la présence militaire américaines au Moyen-Orient seront suffisantes pour maintenir l’Iran à l’écart. Selon le président iranien Ebrahim Raisi, Israël a « franchi les lignes rouges » dans le siège de la bande de Gaza, ce qui « pourrait obliger n’importe qui à agir ».

L’Iran dispose d’options militaires. Il y a le Hezbollah au Liban : une grande milice qui, comme le Hamas, a profité de plusieurs années calmes au Moyen-Orient pour se doter d’armes modernes. Il y a les rebelles Houthis au Yémen, qui ont récemment bombardé Israël avec des roquettes. Et il y a la présence de la Garde républicaine syrienne.

Économiquement, l’Iran peut fermer le détroit vital d’Ormuz. Un passage étroit par lequel doivent passer un cinquième du commerce mondial du pétrole et un autre cinquième du commerce mondial du GNL.

Une désescalade crédible semble aujourd’hui loin. Il ne faut pas attendre grand-chose de la part d’une ONU profondément divisée : cela est également devenu clair ces dernières semaines. Israël appelle même à la démission du PDG António Guterres après avoir critiqué la politique historique israélienne envers les Palestiniens.

Les États-Unis cherchent à équilibrer leur loyauté envers Israël tout en évitant une guerre plus large au Moyen-Orient qui pourrait causer des ravages sur l’économie mondiale. La Chine ne semble pas non plus avoir l’intention d’intervenir. Les communistes ne veulent pas mettre en péril leurs liens avec des pays comme l’Iran.

En Europe, l’expérience de 1914-1918 nous a appris qu’une guerre désastreuse peut aussi éclater « par accident ». Sans que personne ne le dirige réellement. Espérons que nous ne somnambulons pas vers l’abîme du Moyen-Orient.



ttn-fr-31