Ce qui a été présenté comme une réunion de négociation difficile a abouti à un accord étonnamment rapidement mardi. Il fallait faire quelque chose – ce message était très clair après l’annonce de la nouvelle coupure de l’approvisionnement en gaz russe. À midi, l’accord était déjà en place : les États membres européens utiliseront ensemble 15 % de gaz en moins dans les mois à venir. Volontaire au début, mais éventuellement obligatoire en cas d’urgence aiguë.

L’unanimité des États membres a dû être achetée par une longue série d’exceptions et de concessions. Les pays qui ne sont pas connectés au réseau gazier européen – comme les îles d’Irlande, Malte et Chypre – sont exemptés de toute obligation. Des pays comme l’Espagne et le Portugal, qui ne sont connectés au réseau européen que dans une mesure limitée, peuvent également bénéficier d’une exception : ce qu’ils économisent en gaz ne peut pas facilement aller vers d’autres pays.

Les États baltes bénéficieront également d’un régime plus flexible, car ils dépendent du réseau électrique russe. Notre pays a un statut particulier car la Belgique, avec ses terminaux GNL, est très importante pour le transit du gaz vers les autres États membres. Il existe également des exceptions pour les pays qui peuvent démontrer qu’ils ont reconstitué leurs approvisionnements en gaz plus que l’Europe ne l’exige, ou les pays où des secteurs vitaux ont absolument besoin de gaz.

pas de bâton

Y a-t-il effectivement des pays qui n’ont pas pu obtenir d’exception, se sont ensuite demandés les journalistes quand l’accord a été présenté. Il n’y avait pas de réponse. Il a été admis qu’il n’était pas question de sanctions. Si les pays ne réduisent pas leur consommation de gaz, l’Europe n’aura pas de gros bâton pour l’instant.

Le scepticisme reste donc très élevé. S’il y a une obligation, mais que de nombreux pays doivent réduire moins de 15 %, qu’est-ce que cela signifie pour les autres États membres ? Les notables européens ont tapé dans le dos que l’accord est un signal clair à Poutine. Mais que reste-t-il de l’accord si tant de pays obtiennent des exceptions ? L’Europe survivra-t-elle à l’hiver sans gaz russe ?

La centrale électrique au lignite de Neurath en Allemagne.Image ANP/EPA

Le professeur Hendrik Vos (UGent), spécialiste de la politique européenne, lève le pouce. « Ce qui a été convenu mardi n’est certainement pas dénué de sens. Que tout le monde – à l’exception de la Hongrie, qui devient vraiment un paria – s’engage à partager la douleur montre que le sentiment d’urgence est bien là. Poutine avait pensé au début de la guerre que les États membres se retourneraient bientôt sur les pavés en se disputant. Cela s’avère tout à fait différent.

« Ce qui joue en toile de fond : de nombreux pays du Sud y ont également vu une opportunité d’envoyer un signal à l’Allemagne, très dépendante du gaz russe. On leur a dit pendant la crise de l’euro qu’ils avaient pris les mauvaises décisions pendant des années et qu’ils devaient ensuite s’asseoir sur les cloques, mais maintenant les rôles sont inversés. Mais au final, les pays du Sud ont également accepté. Ils réalisent aussi qu’une récession en Allemagne ou sur tout le continent européen n’est pas une bonne nouvelle.

De plus, selon Vos, l’accord marque une nouvelle phase dans les relations entre la Russie et l’Europe. Jusqu’à présent, l’Europe avait accepté avec de longues dents qu’elle devait faire affaire avec le Kremlin pendant un certain temps. Il n’y a donc pas eu de boycott du gaz et du pétrole, même si l’Europe s’est rendu compte qu’elle contribuait au financement de la guerre contre l’Ukraine. En attendant, on prend de plus en plus conscience qu’il est impossible de travailler avec ce Poutine.

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