Draghi et la voie « méditerranéenne » du gaz. L’alliance tactique avec l’Espagne, le Portugal et la Grèce


Un sommet tactique pour coordonner les positions des pays méditerranéens sur le jeu stratégique du gaz, l’arme de destruction économique de cette guerre en Europe de l’Est, d’où proviennent 40% de la ressource énergétique de l’Italie. A Villa Madama, Mario Draghi rencontre l’Espagnol Pedro Sanchez, le Portugais Antonio Costa et en lien avec le Grec Kyriakos Mitsotakis. L’objectif est d’aboutir au Conseil européen de Bruxelles des 24-25 mars (mais un sommet de l’Otan se tiendra aussi avec Joe Biden) avec une position commune des pays d’une même zone, qui ne convergent pas toujours avec les pays du nord , comme l’Allemagne et la Hollande, et aussi vis-à-vis de la France, qui tire une grande partie de ses besoins d’électricité d’origine nucléaire (et qu’elle vend également à l’Italie).

Le premier ministre : séparer le prix du gaz de celui de l’électricité

A la veille de la rencontre, Draghi l’a précisé : l’action nationale doit aller de pair avec des choix communautaires qui, dans la vision italienne – partagée par les autres dirigeants du « front » méditerranéen – doivent envisager « un plafond européen au prix de gaz », en plus de la séparation du prix du gaz de celui de l’électricité. En attendant, l’Italie s’est engagée à diversifier non seulement les sources d’approvisionnement énergétique, mais aussi d’autres matières premières, dont le blé. « Ce n’est pas encore le cas », assure le premier ministre, pour tirer la sonnette d’alarme invitant à un changement des habitudes, proposant une économie de guerre. Mais des « mesures » doivent être prises pour faire face aux conséquences de la guerre et des sanctions. La situation « est d’une grande incertitude », reconnaît-il, répétant qu’il faut observer les faits.

L’hypothèse du plafond de 100 euros par mégawattheure

Qu’y a-t-il sur la table ? Comme mentionné, celui de fixer un plafond sur le prix d’importation du gaz (100 euros par mégawattheure ou peut-être moins). Ensuite, justement, ce découplage du prix du gaz de celui de l’électricité, peut-être produite par d’autres sources. Par ailleurs, des travaux sont en cours – et ce point est également connu depuis un certain temps – c’est l’achat et le stockage commun de gaz – la Commission européenne élabore un plan qui d’une part obligera les États à remplir leurs réservoirs à 90 % d’ici 1er octobre et d’autre part, il fixera les conditions d’un « soutien aux opérations de remplissage coordonnées » – qui s’accompagnera d’une politique décisive de diversification des sources d’achat, en remplacement de la Russie, qui est destinée à quitter pour longtemps le radar commercial de l’Europe . Par conséquent, aux côtés de l’Algérie – une autre source fondamentale – viendront le Qatar (certaines visites gouvernementales ont déjà commencé dans cette direction), et les pays africains où Eni opère depuis de nombreuses années, comme le Congo et l’Angola. En tout cas, la Commission européenne travaille sur une série d’options avec « des mesures d’urgence pour limiter l’effet de contagion des prix du gaz sur les prix de l’électricité », dont des « plafonds temporaires ».

Accords dans le temps avec la Russie, la France et l’Algérie

Un sommet « énergie » donc, plus urgent que jamais, compte tenu des prix stellaires atteints, qui ont fait bondir l’inflation à 5,7%, le plus haut depuis 1995, année où le spread a atteint un plus haut historique de 630 (c’était toujours la lire). Et c’est l’un des nombreux qui ont eu lieu au cours des dernières années. Lire avec les lectures d’aujourd’hui, celle de juin 2006 entre le Premier ministre Romano Prodi et le déjà inébranlable Vladimir Poutine, au Kremlin, où un accord a été conclu sur l’énergie, pour permettre aux entreprises russes d’entrer sur le marché italien et à ces entreprises d’extraire le gaz russe et le pétrole, et un accord préliminaire pour créer une banque d’investissement commune. Après un an, Prodi et Nice ont également signé une « paix énergétique » entre l’Italie et la France avec le président français Nicolas Sarkozy, pour garantir l’approvisionnement en électricité de l’Italie. Et dans les mêmes jours, Prodi signe un accord avec l’Algérie pour la construction du gazoduc Galsi, destiné à relier le pays du Maghreb à la Sardaigne (puis au continent, en Toscane), dans le but de fournir 40 milliards de mètres cubes par an. Mais le Galsi ne se concrétisera jamais : le projet, très lent à démarrer, sera suspendu « indéfiniment » suite à l’accord entre le russe Gazprom et l’Italie en 2014.



ttn-fr-11