Diverses théories expliquent comment l’identité de genre peut être politisée à droite : pour rendre un programme plus rassurant, pour réitérer un mythe fondateur, pour confirmer un rôle disruptif, pour défendre certaines libertés. Ce qui est clair, c’est qu’il n’existe pas de corrélation évidente entre le leadership féminin et les politiques sociales féministes. Au contraire.


ET un moment exceptionnel pour les femmes en politique. Pour la première fois dans l’histoire de l’Europe, les dirigeants qui façonneront l’avenir sont des femmes. Et c’est Ursula von der Leyendu PPE, qui s’oriente vers une reconfirmation en tant que membre de la Commission. Marine Le Pen, qui a triomphé aux Championnats d’Europe et est confiant dans sa récidive aux élections françaises. Et naturellement, Giorgia Meloni. Mais le Premier ministre estonien est également là Kaja Kallas, libéral, parmi les plus grands partisans de la guerre en Ukraine, qui pourrait obtenir la nomination du haut représentant de l’UE pour la politique étrangère. L’actuel président du Parlement Roberta Metsola, PPE, qui devrait rester en place. Le détail qui n’est pas anodin et impossible à rater ? Ils sont bien ou au centre. Il peut être surprenant que tandis que la gauche, plus attentive à l’égalité des sexes et à l’inclusion, est incapable d’exprimer des femmes leaders, les partis de droite l’ont fait au cours des dernières décennies., plus ou moins radical. Mais un point doit être précisé : ce nouveau leadership, même s’il peut paraître paradoxal, ne correspond pas à des choix féministes. Au contraire.

G7, la blague de Giorgia Meloni à Biden : « Il ne faut pas laisser une femme attendre »

De von der Leyen à Giorgia Meloni : l’Europe aux mains de femmes dirigeantes. La couverture de The Economist

Le rôle clé des femmes dans « façonner l’Europe » du futur proche avait déjà été défini, ces derniers jours, par une couverture duÉconomiste dans lequel Giorgia Meloni partage la photo avec Ursula von der Leyen et Marine Le Pen. « Le besoin d’un leadership fort et uni en Europe – lit-on dans l’article mentionné en couverture – n’a jamais été aussi grand ».

Les femmes en politique ne signifient pas la politique pour les femmes

Comme détaillé par un article du magazine Il Mulino, la montée des femmes en politique ne conduit pas à une modernisation de la vision sociale des partis de droite. Les politiques restent hyper-conservatrices : anti-avortement, anti-féministe et anti-LGBT. Pourquoi, alors, la droite se concentre-t-elle sur les femmes dirigeantes ? Il existe diverses théories.

ilMulino cite, par exemple, d’autres exemples de femmes occupant des postes de direction qui, par leur présence, ont réussi à donner un éclairage différent à la politique et à la rhétorique de la droite radicale. Depuis Pia Kjaersgaard, a dirigé le Parti populaire danois (DF) jusqu’en 2012, menant des politiques de droite, notamment en matière de protection sociale et d’immigration. À Alice Weidel (ouvertement homosexuel) qui a contribué comme peu d’autres à la montée d’Alternative für Deutschland en Allemagne. Jusqu’à Susanne Riess qui a remplacé Jörg Haider, président du parti de droite radicale FPö, précisément pour faciliter sa légitimation institutionnelle en tant que femme.

Roberta Metsola, Marine Le Pen, Giorgia Meloni, Ursula von der Leyen, Kaia Kallas.

La politisation de l’identité de genre

D’une manière générale, et sans rien enlever aux capacités politiques évidentes de tous ces dirigeants, l’identité de genre est politisée: que la « frontwoman » soit une femme est utile pour le programme politique. Et cela peut se produire sur la base de quatre modèles.

Les femmes en tant qu’étrangères

Une femme leader contribue à renforcer l’image de la droite radicale mouvement politique en rupture avec l’establishment. C’est la thèse du philosophe politique Giorgia Serughetti: Le succès de Giorgia Meloni tient aussi au fait qu’elle peut se présenter comme une agente de changement dans un monde dominé par les hommes.

Les femmes comme mères

Il suffit de regarder Ursula von der Leyen, qui elle s’appelle Ursula von der Leyen mais aussi mère de sept enfants. Ou rappelez-vous Margaret Thatcher qui n’a jamais cessé de préparer le dîner pour sa famille et, parfois, même pour son cabinet. Ou réécoutez le slogan de Giorgia Meloni : «Moi Giorgia, je suis mère, je suis chrétien, etc. Choisir une femme pour les partis de droite radicale, c’est rappeler l’association entre la mère et la patrie, évoquant les mythes qui sous-tendent le nationalisme. Elles sont évidemment cuisinières et patronnes, mères et ouvrières : c’est-à-dire qu’elles interprètent leur rôle de manière moderne (Scrinzi, 2017).

Les femmes comme un visage aimable

Le stéréotype règne. Qui dit femme dit mère. Le féminin signifie prévenance, compassion, empathie : des qualités qui découlent du travail de soins que les femmes ont toujours effectué au sein de la famille. Et il n’y a qu’un pas entre la maison et la politique. L’ascension d’un leader favorise donc le normalisation de la droite radicalequi parvient à se montrer plus rassurant par rapport aux modèles virils (et violents) qui lui sont historiquement spécifiques.

Les femmes comme symbole des libertés à défendre

A cet égard, nous parlons de fémonationalisme (concept inventé par la sociologue Sara Farris) : les partis de droite s’approprient les thèmes et les revendications féministes mais les plient pour soutenir leurs programmes.

Par exemple, sur les terres de conflit entre l’émancipation des femmes occidentales et l’assujettissement des musulmans.

Un exemple en ce sens est aussi, selon Maura Gancitano de Tlon.it, le célèbre discours de Giorgia Meloni sur le « plafond de verre ». « Elle a abordé un sujet cher aux femmes, qui touche à l’émotion. Dans son discours, les femmes sont émues par l’amour, par les émotions, nous sommes faites comme ça, doucement compliquées. »

Fondamentalement, selon les différentes théories les femmes de droite fonctionnent en politique parce qu’elles adhèrent au modèle patriarcal et ils rivalisent d’égal à égal (« le » Premier ministre), sans vouloir changer l’état des choses. Le problème à gauche demeure : puisque les femmes progressistes remettent en question le schéma, et sont féministes, elles en ressortent (beaucoup) moins.

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