Les buts encaissés en rafales par les deux sont le signe d’un malaise qui va au-delà de la condition physique. Voici ce qui arrive aux deux grands noms

Vingt-cinq buts en huit matchs : si les équipes qui se battent pour le salut les marquent, il est presque impossible qu’elles puissent éviter la Serie B. Et si Milan et la Juventus les marquent ? C’est presque incroyable : allez, comment est-ce possible ? Au lieu de cela, c’est le cas. Les Rossoneri ont remporté le Scudetto surtout pour leur force défensive : ils ont encaissé 31 buts en 38 journées, personne n’a fait mieux ; dans la phase de construction, au contraire, trois équipes ont été plus efficaces. Pourtant, là-bas, là-bas, l’équipe de Pioli a fondu. A tel point que sur les quatre derniers matches officiels, elle est tombée quatorze fois, avec une escalade inquiétante : deux avec Lecce, trois avec l’Inter en Supercoupe, quatre avec la Lazio, cinq avec Sassuolo (un coup historique). Jusqu’à la prochaine fois, il y a un autre derby… Et puis il y a la Juve, qui entre 2022 et 2023 a remporté huit matchs sans encaisser de but : presque un record, certainement un exploit. Puis elle est allée à Naples, a été submergée par cinq buts et ne s’en est jamais remise : elle en a pris un à Monza en Coupe d’Italie, trois à l’Atalanta, deux autres hier à Monza même.

Méconnaissable

Le problème pour Milan et la Juve n’est pas seulement la défense et il n’y a pas que les défenseurs, bien sûr : les fautes sont (aussi) avec l’équipe. Mais les erreurs des individus sont incroyables. Pioli a des joueurs méconnaissables partout, mais surtout dans ce département : Kalulu et Tomori (absents hier), Theo et Calabria ressemblent à des jumeaux différents – très différents – de ce qu’ils étaient la saison dernière. Le sentiment est que l’effondrement n’est pas seulement tactique et technique, mais aussi physique : le Français est revenu anéanti par la Coupe du monde, qui a aspiré toute son énergie ; le capitaine a perdu de la vitesse et cela s’est vu contre Sassuolo. Quant à Allegri, on avait le sentiment que sa Juve accomplissait un petit, grand miracle : changer sans cesse d’hommes à trois en défense, déployer n’importe qui en fonction des blessures et de la fatigue, résister en tout cas sans encaisser de but. De Danilo à Bremer, d’Alex Sandro à Rugani, du délabré Bonucci à Gatti, de Szczesny à Perin, chacun s’est relayé en arrière-garde, et pendant huit matches avec une efficacité surprenante. Cependant, la magie opère : patatrac.

Limites

Mais Milan et la Juve ont non seulement perdu leur défense, mais aussi leur tête, ou du moins leur sérénité. Ils véhiculent une idée d’insécurité, de précarité, de peur. Comme si ces armées apparemment insurmontables – les Rossoneri de la saison dernière et les Bianconeri de huit victoires consécutives – s’étaient soudain rendu compte qu’elles avaient dépassé leurs limites, au point de jouer avec la peur de ceux qui ont été démasqués. Les rois sont nus. Maintenant que tout le monde a compris qui nous sommes, comment cacher nos limites ? Certes, le marché n’a pas aidé Pioli, au contraire : l’été a dû apporter des renforts, mais Milan s’est avéré pire que la saison dernière après avoir perdu Kessie et embauché une série de joueurs qui n’ont rien donné jusqu’à présent : De Ketelaere, Thiaw, Dest, Vranckx, Adli, Origi (on se souviendra de lui pour le magnifique but contre Sassuolo, le 5-1…). Le discours de la Juve est différent, sur le plan mental, nous voulons dire. Di Maria a déclaré après la défaite contre Monza : « Ce n’est pas facile de jouer avec le fardeau de moins 15 ». Même quelqu’un comme lui, navigué par mille batailles, est perdu devant le penalty. Oui, car il est normal, humain dirions-nous, qu’un joueur de la Juventus entre sur le terrain aujourd’hui en se demandant : pour quoi je joue ? Pour la Ligue des champions, pour la Ligue Europa ou pour le salut ? Tout ce que j’ai conquis dans le championnat déjà terminé ne sera-t-il pas renversé ? Et surtout, est-ce que je déciderai de mon sort ou est-ce que ce seront les juges et l’UEFA ? Le joueur non préparé se donne la réponse : non, ce ne sera pas moi. Il est donc inévitable qu’il soit dissous, incertain, hésitant. Il est sacro-saint que la justice sportive suive son cours, à Dieu ne plaise. Mais il est juste d’accorder aux joueurs d’Allegri les circonstances atténuantes de l’incertitude.



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