Dans un monde où peu dévorent les ressources de beaucoup, le langage alimentaire nous renseigne sur l’évolution ou l’involution de l’homme plus que toute autre philosophie.


Serena Dandini (photo de Gianmarco Chieregato).

Le mot régime vient du grec διʹαιτα (diaita) et signifie mode de vie. Je ne sais pas si cette définition est plus rassurante en cette période où il faut se soumettre à l’ancien rite en vogue chez les peuples du premier monde, celui riche et confortable, c’est-à-dire le redoutable test du maillot de bain.

Les remèdes sont généralement pris trop tard et la nourriture devient un ennemi acharné à tenir à distance avec diverses privations suggérées par le dernier saint homme sur internet.

Ou suite à un conseil de dernière minute entendu par hasard lors d’une frénésie hivernale qui commence généralement toujours par la phrase fatidique : « Un de mes amis fait un jeûne intermittent puis seulement des bananes pendant une semaine et il a perdu… ». La nourriture est devenue une obsession dans tous les senson en parle, on le désire, on le craint, on l’admire à la télé et on vante son arôme.

Ce n’est pas un hasard si Dante jette les gourmands dans la boue sous une pluie nauséabonde, mais cela aurait pu être encore pire, car Dieu connaît le péché et aussi la nourriture et « les normes alimentaires sont le fondement des normes morales, plutôt que leur conséquence » comme ils nous le rappellent Marino Niola et Elisabetta Moro dans un petit essai intéressant Mangez comme Dieu l’ordonne (Einaudi).

« Manger comme Dieu l’ordonne » de Marino Niola et Elisabetta Moro (Einaudi).

Les deux anthropologues contemporains dont je vous avais déjà signalé le précédent Embrasserpar des champions de la communication et des passionnés du sujet ils reconstituent une petite histoire des religions à travers la nourriture que chaque culte a réglementée dans une série de commandements que l’on pourrait définir comme « les recettes de Dieu ».

Une approche atypique et séduisante, plus actuelle que jamais en ces temps de pauvreté croissante, où l’appétit immodéré de quelques-uns dévore sans scrupule les ressources de tous, affamant la majorité des habitants de la planète.

Toutes les religions depuis la nuit des temps nous ont appris la convivialité et le partage avec des préceptes différents, des vertus qui distinguent l’être humain de l’animal, et il est extraordinaire de découvrir, à la suite de la reconstitution historique pleine d’esprit des deux auteurs, comment le langage alimentaire nous renseigne sur l’évolution ou l’involution de l’homme sur terre plus que toute autre philosophie.

Si vous cherchez vraiment un régime pour vous remettre en forme plus que de nombreux manuels en vogue je vous conseille de lire ce livre, vous pourrez retrouver vos racines les plus profondes et face aux privations avec le même état d’esprit qu’Ulysse : il refuse les mets délicieux de la nymphe Calypso qui promettent l’immortalité.

iO Femme © REPRODUCTION RÉSERVÉE



ttn-fr-13