Dans la société "receveur de smileys" nous sommes obligés de toujours nous montrer vainqueurs. Mais ce n’est qu’en acceptant notre fragilité que nous pourrons affronter l’indifférence de ces temps


Serena Dandini (photo de Gianmarco Chieregato).

Ll’enthousiasme démotivé évoqué par Paolo Sorrentino dans un petit monologue hilarant de la série italienne Appelle mon agent c’est une attitude pernicieuse et désormais virale. A la question fatidique « Comment allez-vous ? », pour ne pas décevoir l’auditeur, on se sent obligé de répondre avec un sourire éblouissant « Très bien, super ».

Et – hormis quelques râleurs professionnels, qui appartiennent à une catégorie à part, celle de ceux qui doivent exposer des malheurs et des maux dignes du Livre Guinness des Records – nous sommes tous amenés à simuler une émission télévisée d’optimisme et à cacher toute ombre qui survole nos vies.

Nous devons paraître toujours jeunes, toujours beaux, optimistes et performants : telles sont les règles recommandées à ceux qui veulent faire carrière, gagner un partenaire et généralement se frayer un chemin dans la société moderne de l’attrape-sourire. La mélancolie est un sentiment impopulaire et doit être savamment dissimulée derrière des sourires de circonstance.

« Le don de la mélancolie » de Susan Cain (Einaudi Stile Libero).

Pourtant, sans mélancolie, il n’y aurait pas d’art, de littérature, de musique, de poésie et de toutes les meilleures expressions de l’âme humaine. Pour nous rappeler, il vient de sortir Le don de la mélancolie. Enquête sur un sentiment (Style libre Einaudi) par Susan Caïnécrivain américain au sourire ensoleillé qui a consacré un livre intense et à contre-courant à cet état d’esprit délicat qui se démarque des dizaines de manuels qui suggèrent comment être heureux à tout prix.

L’auteur, avec un passé d’avocat à succès à Wall Street, avait fait la une des journaux avec le livre précédent, Calme. Le pouvoir des introvertis dans un monde qui ne peut pas s’arrêter de parler (Bompiani), devenu en peu de temps un best-seller dans l’Amérique des extravertis et des narcissiques invétérés.

« Calme. Le pouvoir des introvertis dans un monde qui ne peut pas s’arrêter de parler » de Susan Cain (Bompiani)

Avec ce nouvel ouvrage, puisant dans la religion, la philosophie et les neurosciences, à travers de précieux conseils, citations et récits personnels, Caïn nous apprend à cultiver la mélancolie comme une fleur précieuse, indispensable pour entrer en contact avec les autres et capter la beauté du monde qui nous entoure. Ce n’est qu’en acceptant notre fragilité et nos zones d’ombre que nous pourrons rester humains et affronter l’indifférence de ces temps tragiques.

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Et, comme le conseillaient les Beatles dans Hé Jude, le remède le plus approprié à la mélancolie est toujours d’écouter une chanson triste et de la mettre dans son cœur. Après ça ne fera que s’améliorer.

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