Dans la sexualité et les relations, prenez exemple sur les animaux marins

En plus d’être un provocateur et un innovateur linguistique, Hugo Brandt Corstius s’est également avéré être le foyer d’un amoureux des animaux. En 2009, cinq ans avant sa mort, il rejoint l’émission télévisée Livres pour parler de ce qui allait devenir son avant-dernier livre, le magnifiquement intitulé Règne animal pauvre en humains. À la télévision, Brandt Corstius a parlé, entre autres, de l’ironie du progrès technologique, qui ne faciliterait plus la vie humaine, mais plutôt la contrecarrerait. Non, alors les fourmis. Ils ne peuvent pas parler et ils ne conçoivent pas non plus de machines, mais ils peuvent bien travailler ensemble. Nous les méprisons, mais nous pouvons en fait apprendre quelque chose d’eux.

Un état d’esprit similaire se retrouve dans bleu profond profond, le premier roman de Nikki Dekker (1989), qui penche plutôt vers un essai. Vous pouvez y lire alternativement combien d’efforts il faut aux gens pour établir et maintenir des relations les uns avec les autres, et sur la souplesse avec laquelle les animaux abordent cela. Et plus précisément : les créatures marines. Dekker (qui n’est pas biologiste) aura étudié en profondeur le monde sous-marin et déballera d’innombrables faits sur le lecteur : que les cachalots communiquent entre eux dans une sorte de code morse, que la pieuvre n’est pas tant « stupide » (que note Aristote) mais plutôt curieux que toutes les anguilles ne soient pas aussi pressées d’arriver à la mer des Sargasses et que les hippocampes soient monogames « par nécessité absolue ». Les portraits maritimes de Dekker sont sans exception en faveur de l’animal décrit. Comme tout cela est merveilleux. Mais il faut bien regarder et mettre ses préjugés de côté. Juste deux phrases frappantes : « Chaque année, dix personnes dans le monde sont tuées par un requin. Chaque année, 100 à 250 millions de requins sont tués par l’homme. Que ces requins ne ripostent pas plus souvent.

Sur bleu profond profond n’est pas un amour innocent des animaux. Dans les parties personnelles du texte, nous lisons l’histoire d’une figure-I en difficulté qui ne lui appartenait pas complètement depuis le tout début et qui plus tard – dans une vie par ailleurs encore très jeune – n’atterrit jamais vraiment et définitivement avec personne. C’est un reportage au cœur de la vie de la génération Y : international (nous sommes partout et nulle part), hédoniste (des fêtes à gogo) et fluide, avec les étiquettes traditionnelles de genre et de sexualité qui en font les frais. En ce qui concerne ces derniers, prenons un exemple chez les animaux aquatiques, car eux non plus n’aiment pas les boîtes. Il s’agit en partie d’un livre sur le caractère naturel de la mer.

En tant que romancier, Dekker n’est pas encore tout à fait mature. Cela ne peut pas être dû à son tempérament et à son ressentiment, elle semble pouvoir s’en servir pour les années à venir, mais pour un texte plus long, elle est trop prévisible et le service de ces fruits de mer finira par devenir une routine. C’est une matière première avec laquelle elle travaille, qui aurait fait plus d’impression sous une forme réduite. Désormais toutes sortes d’amis, de copines et de relations sont traités, alors que ce sont justement les parties méconnues, donc antisociales, qui font le plus d’impression, comme dans la description pure d’une sensation, comme la natation. Et elle est aussi drôle quand elle ne prend pas l’autre au sérieux. Auparavant, en discutant via l’ancien MSN : « Le chiffre bleu de MSN saute de haut en bas sur l’écran. Je porte mon pull préféré : un blanc à fourrure avec un ours polaire dessus. Quand il me demande ce que je porte, je réponds : une courte robe noire. Quand il me demande ce que je bois, du vin blanc. Il y a une tasse de Fristi sur le bureau.



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