En ce qui concerne les tendances de la mode, il devient de plus en plus difficile de regarder dans une boule de cristal et de les prévoir. Beaucoup de choses se passent à la fois et la culture du monde fait des sauts inattendus. Afin de jeter un regard sur la saison automne/hiver 2024, nous avons frappé à la porte de la chercheuse de tendances Hilde Franqc. Depuis son studio anversois, elle suit ce qu’est la mode saison après saison. Cela commence par un morceau de sociologie : qu’est-ce qui se passe dans la tête des porteurs de mode ?

Le fil conducteur des prédictions de Franqc est le mot à la mode de l’intelligence artificielle (IA), ou plutôt la résistance à celle-ci. Nous en parlerons à l’automne 2025 alors que l’industrie de la mode embrasse la discussion.

Une terre à partager et à porter

La durabilité en 2024/25, non loin des objectifs climatiques ambitieux de l’Europe, signifie rechercher de grandes solutions. Pour l’industrie de la mode, c’est un fait qui n’a pas grand-chose à voir avec les tendances, mais plutôt avec la mise en œuvre visuelle de la mode, qui change progressivement. Après une saison de messages virulents et militants, les thématiques se font plus subtiles, se tournant vers l’admiration pour la nature.

Les références antérieures aux galaxies, au soleil, à la lune et aux arrangements floraux cèdent la place à une représentation plus pure des éléments. Nous nous tournons maintenant vers la planète que nous partageons, et la terre devient l’inspiration de l’architecture et de la mode. Ceci est rendu tangible par des formes organiques, des fleurs au crochet et des tons de terre imparfaits de peintures biosourcées. Les biomatériaux ont le vent en poupe, se généralisent et se répandent. Les passerelles se transforment en mondes extraterrestres et en arrière-plans surréalistes avec des plantes et des arbres imaginaires, offrant une évasion indispensable de la réalité.

Fleurs au crochet chez Nahmias. Image: FW23 de Nahmia via Launchmetrics Spotlight
Fleurs au crochet chez Nahmias. Image: FW23 de Nahmia via Launchmetrics Spotlight

surhumain

On craint que ChatGTP ne remplace les emplois – et avec raison. Il est indéniable que les processus d’IA changeront le monde, mais il est difficile d’imaginer exactement à quel point cela deviendra futuriste. Le travail de la mode est de dramatiser cela, avec des verts Matrix-esque et des bleus Windows. Le latex fait son grand retour, et les designers expérimentent l’effet « glitch », clin d’œil au gros crash informatique auquel on aspire parfois secrètement.

Latex et bleu vitres chez Marc Cain Image: Marc Cain FW23 via Launchmetrics Spotlight
Loewe présente des robes qui semblent avoir un « pépin ». Image : Loewe FW23 via Launchmetrics Spotlight

Même si l’IA devient la norme, le travail humain reste important. Un contre-mouvement est donc basé sur l’humanité, qui réside dans les talents uniques, l’intelligence émotionnelle et les contacts sociaux. L’ordinateur ne gagne pas ici. La promesse colorée de l’humanité a également sa place dans la saison FW 2024. « Keep calm » est le message des pastels et du violet cosy et non sexiste. La beauté d’une telle palette de tous les jours est qu’elle se marie bien ; comme les humains et l’IA dans un monde idéal. La tactilité est également très importante avec ce sujet. Les matières sont transparentes et les formes fluides, avec la résurgence des plis appliqués.

Le bonheur est poussé à l’extrême

Les jeunes générations ne voient plus le bonheur à aussi long terme que leurs (grands)parents. L’entrée en bas de l’échelle de carrière ou un emploi à vie en échange de sécurité et de loyauté ne les satisfait plus. Au contraire, ils cherchent leur bonheur dans le présent. Mais si chaque rencontre doit être significative et chaque visite dans un restaurant doit déclencher un moment d’aha, un tel style de vie apporte aussi beaucoup de stress.

Barbie rose et satin de chez Patou. Image: Patou SS24 via Launchmetrics Spotlight

Vous ne le voyez pas de l’extérieur, d’ailleurs, et la mode adopte ce look épuré en ajoutant des blocs de couleur et des tissus brillants comme le satin. La référence est le nouveau film Barbie qui teste la frontière entre le rêve et la réalité. Les couleurs saturées dégagent une ambiance positive qui résonne immédiatement. Les combinaisons ne sont pas immédiatement logiques, mais expressives et intéressantes. Afin d’apprendre l’art de vivre l’abstraction, des maîtres peintres comme Cézanne et Gauguin sont réintroduits. Les imprimés maxmalistes reflètent parfaitement le dilemme de YOLO et FOMO. Pour maintenir l’équilibre, le violet, couleur du bien-être mental, est encore une fois indispensable. Si vous transférez le phénomène à un smoking d’affaires, cela relève du « bleasure » : des affaires avec plaisir.

Cet article a été initialement publié sur FashionUnited.nl. Traduit et édité par Simone Preuss.



ttn-fr-12