Marc Van Ranst est virologue à la KU Leuven. Sa chronique paraît toutes les deux semaines, en alternance avec celle d’Els van Doesburg.

Marc Van Ranst

C’est un dimanche matin ensoleillé et les membres du conseil d’administration de la N-VA à Melle attendent un peu nerveusement à l’entrée de la Sint-Bavokerk l’arrivée de leur conférencier invité Theo Francken. Il sera là Théo tours-jouer pour ajouter de l’éclat à la célébration du 11 juillet. Depuis 2019, la Sint-Bavokerk n’est pas seulement utilisée pour les mariages, les funérailles et les baptêmes, mais fonctionne également comme un espace culturel multifonctionnel. Une centaine de personnes de Mellen sont déjà dans l’église. Théo Francken arrive pile à l’heure. Les festivités peuvent commencer.

Après la présentation et le chant du Lion Flamand, Theo envoie un selfie urbi-et-orbi dans le monde entier sur Twitter. L’arrière-plan du selfie est dominé par un crucifix et un énorme drapeau de lion flamand sur la grande salle de l’église. Pas le drapeau tricolore officiel de la Communauté flamande avec un lion à la langue rouge et aux griffes rouges, mais le drapeau de bataille flamand entièrement jaune-noir. Le même drapeau de bataille est également drapé sur le pupitre. Le texte du tweet se lit comme suit : « Salle comble à Melle, église pleine en fait. Aujourd’hui pas de grand-messe à 11h, mais un discours du Père Théo, missionnaire pour les Flandres le 11 juillet.

Le professeur Mieke Van Houtte, professeur de sociologie de l’éducation à la Faculté des sciences politiques et sociales de l’Université de Gand, a répondu à l’aiguillon de Theo Francken par un seul mot : « Dégoûtant ».

Koen Daniëls, député au Parlement flamand et spécialiste de l’éducation de N-VA, a réagi sur Twitter très en colère au tweet du professeur Van Houtte : dans une institution flamande issue de Flamands qui célèbrent leur fête flamande le 11 juillet ?

Que vous trouviez « horrible » un sermon nationaliste du « missionnaire pour la Flandre » dans une église (non consacrée) ornée de drapeaux de bataille, c’est le droit du collègue Van Houtte. Imaginez un politicien flamand donnant une conférence « Mohamed toert » dans une mosquée bondée et postant un selfie sur Twitter avec un drapeau noir et blanc de la bataille du jihad rayat-al-sawda en arrière-plan. Imaginez ce politicien tweetant : « Discours du Mufti Mohamed, missionnaire pour les Flandres. La pièce serait trop petite, n’est-ce pas ?

Mais ce qui est vraiment désagréable, c’est qu’une députée flamande pense qu’elle devrait faire la leçon au professeur Van Houtte et équilibre le financement de ses recherches universitaires avec ses commentaires négatifs sur un tweet du 11 juillet de M. Francken. Onderwijs is een Vlaamse bevoegdheid, en het is behoorlijk onkies van Koen Daniëls om zelfs maar tangentieel te suggereren dat wanneer een universiteit geld krijgt van de Vlaamse overheid, de werknemers van die universiteit maar beter hun dankbaarheid en loyaliteit kunnen betuigen door verplicht mee de natievormingstango te danser.

Un peu plus tard, le recteur Rik Van de Walle répond avec esprit au tweet de Koen Daniëls : « Il est honteux (…) que les gouvernements flamands n’aient pas respecté le décret de financement depuis de nombreuses années. En conséquence de quoi les universités sont chaque année (…) privées de dizaines de millions qui leur sont dus. Le recteur met le doigt sur la plaie : la Flandre, qui aime tant coquetter avec la boutade selon laquelle « le cerveau est la seule matière première en Flandre », sous-finance grossièrement son enseignement supérieur depuis des années.

Daniëls veut creuser un peu plus et répond au Recteur Van de Walle : « Il s’agissait d’un professeur de votre institut de recherche flamand qui pensait que la célébration de la fête flamande était ‘horrible’. Mais vous n’entrez pas là-dedans. » Ce que le député Koen Daniëls fait ici sans fard, c’est ordonner au recteur de rappeler à l’ordre son collaborateur « dissident ». Selon Daniëls, la fête flamande doit et sera observée. Ou bien vous vivrez de mauvaises choses. Alors annulez la culture. Réveillé ! Nous ne devrions jamais considérer qu’il est normal que des politiciens menacent des scientifiques.

C’était la dernière fête flamande avant les élections de juin 2024 et la nervosité monte. Le drapeau de bataille flamand est maintenant politiquement détourné depuis des décennies par un programme séparatiste (et dans le cas du Vlaams Blok également raciste). Le travailleur flamand ne suit plus et ne signale plus. La plupart des Flamands sont polyamoureux en termes de choix de nation. Nous aimons la Flandre, mais aussi la Belgique et l’Europe. Il n’y a nulle part près d’une majorité pour une nouvelle division de notre pays. Les missionnaires n’y changeront rien.



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