Bras stricts, pieds frivoles dans ‘Silenzio’

Le silence est l’absence de son ou de mouvement, selon les Van Dale. Dans Silence, la nouvelle performance d’Andrea Leine et Harijono Roebana, un large éventail de sons, de rythmes et de mélodies se fait entendre et suit une impulsion de mouvement après l’autre, avec parfois, encore, un moment d’immobilité, ainsi que le jeu souvent agité du le violoncelliste Ketevan Roinishvili et l’accordéoniste Renée Bekkers se reposent dans les fragments réconfortants du ‘Mille Regretz’ de Josquin. Ensuite, il est temps pour une étreinte silencieuse.

L’homme occidental moderne s’est déshabitué du silence. Le silence est devenu menaçant, parfois assourdissant. Et tout comme le noir a absorbé toutes les couleurs, le ‘silence’ de Silenzio porte tous les sons et mouvements : outre le mélodieux ‘Mille Regretz’ et, parfois, les claquements de langue et les sifflements des danseurs, l’atmosphère mystique d’Arvo Pärt dans une transcription pour violoncelle et accordéon de Fratres, la violence au violoncelle de George Crumbs Sonate pour violoncelle seul (Toccata) et les grappes et les champs sonores, le tremblement et le soupir du bouton diatonique dans les compositions de Sofia Gubaidulina.

En réponse à cela, la chorégraphie est tour à tour ludique ou fiévreuse, toujours avec ces typiques bras morts droits tendus horizontalement ou verticalement avec lesquels les danseurs déterminent en quelque sorte leur place dans l’espace et les uns par rapport aux autres. Parfois très concrètement, lorsqu’ils s’alignent à 90 degrés l’un par rapport à l’autre. Mais aussi stricts que soient ces bras, les pieds rebondissent si frivolement, parfois à plat à travers la pièce, puis sautent à nouveau tout droit.

Beaux sont les solos d’Aika Goto, qui balance ses bras comme un rasoir comme le pendule d’une horloge. En chœur, elle répète le fragment entre les formations en constante évolution. L’ordre de ceux-ci n’est pas toujours logique. Puis le regard se dirige vers les coulisses, où Emma Bogerd traverse la piste en ultra ralenti. Dans son costume blanc, elle avance, pas à pas, presque imperceptiblement mais régulièrement, au fil du temps. En silence.



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