Le président sortant Kais Saied n’a pas de véritable concurrent lors de l’élection présidentielle en Tunisie, explique la chercheuse en autocratie Irene Weipert-Fenner. Mais il commençait peu à peu à manquer de boucs émissaires face à la mauvaise situation économique.
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ZDFheute : Ils supposent que Kais Saied sera réélu président. Qu’est-ce qui vous fait penser cela ?
Irène Weipert-Fenner : Les principaux candidats opposants ont été soit emprisonnés, soit exclus de la course présidentielle par la commission électorale. Il faut savoir que Saied a déjà pris de facto le contrôle de la Commission en 2022.
Mais d’une manière générale, l’exclusion généralisée de la concurrence témoigne d’une certaine nervosité. Saied ne sait pas dans quelle mesure ses discours sur les théories du complot entourant les élites corrompues et les puissances occidentales sont toujours efficaces.
…effectue des recherches sur les conflits nationaux et les mouvements sociaux à l’Institut Leibniz pour la recherche sur la paix et les conflits. Ses recherches portent sur l’Afrique du Nord, en particulier la Tunisie.
ZDFheute : Il existe néanmoins deux candidats opposés approuvés par la commission électorale. S’agit-il d’adversaires sérieux pour Saied ?
Weipert-Fenner : Sur un total de 17 candidatures soumises, l’autorité électorale n’en a retenu que trois – dont Saied – et des exigences bureaucratiques élevées ont été imposées.
Ayachi Zammel reste le candidat d’opposition le plus probable, mais il a été condamné cette semaine à douze ans de prison. Il aurait contrefait les signatures de partisans nécessaires à sa candidature.
Le troisième candidat est Zouhair Maghzaoui. Il a soutenu la dissolution du Parlement en 2021, après quoi Saïed a progressivement pris le pouvoir. Il ne constitue donc pas non plus une véritable opposition.
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ZDFheute : Que pense la population en général d’un président dont il est peu probable qu’il puisse être démis de ses fonctions ?
Weipert-Fenner : On ne sait pas exactement dans quelle mesure Saied jouit encore de l’approbation des Tunisiens. Cependant, il n’existe pas de véritable alternative à Saied.
Personne ne veut revenir à l’après-révolution de 2011. Les partis politiques sont généralement tombés en discrédit et le Parlement est devenu un lieu de luttes politiques internes. L’impression générale était celle d’institutions démocratiques inefficaces et peu soucieuses du bien commun.
Il y a eu beaucoup de protestations et de ressentiment face à la mauvaise situation économique, et beaucoup ont perdu confiance dans le système. Saïed en profite.
Le premier tour des élections présidentielles en Tunisie aura lieu le 6 octobre. Les résultats préliminaires sont attendus trois jours plus tard. Le résultat final officiel le 9 novembre. Si aucun candidat n’est élu à la majorité absolue, un second tour aura alors lieu.
ZDFheute : Le pays est lourdement endetté et continue de lutter contre une inflation élevée. Le chômage des jeunes, en particulier, est très élevé. Saïed n’en subit-il pas un préjudice politique ?
Weipert-Fenner : Saied utilise un récit nébuleux de bouc émissaire contre les islamistes et les élites corrompues qui, soutenues par l’Occident, voudraient piller le pays.
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Afin de modifier durablement la situation économique, il faudrait un gouvernement doté de la volonté politique de façonner les choses. Mais je ne le vois pas pour le moment.
ZDFheute : Dans le même temps, une opposition de la société civile semble exister. Il y a des manifestations à Tunis – contre Saied.
Dans le même temps, la population est politiquement plus démobilisée : il y a des manifestations, mais leur nombre diminue. Le taux de participation aux dernières élections législatives a également été très faible.
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Et pour l’UE, l’énergie verte des pays voisins apparaît comme indispensable sur la voie de la neutralité climatique souhaitée. Les critiques à l’égard de l’appareil d’État et des élections non libres passent au second plan.
L’entretien a été réalisé par Lukas Nickel. Il fait actuellement un reportage depuis la Tunisie pour ZDF.
Source : ZDF