Après le dernier souper avec pizza, Olivier Vandecasteele a entamé 455 jours de captivité : c’est ainsi que la Belgique l’a ramené

Après un an de bataille politique et juridique autour d’un traité avec l’Iran, Olivier Vandecasteele revient en faisant fi du traité. Un temps précieux a-t-il été perdu ? Reconstitution de 455 jours de négociation avec un État terroriste, garder son calme et recommencer.

Bruno Struys

Le 24 février de l’année dernière, la Russie envahit l’Ukraine et les services secrets iraniens envahissent un appartement à Téhéran. Le Belge Olivier Vandecasteele mange une pizza avec une dizaine d’amis. Un dernier souper, car Olivier a ses valises avec lui. Le lendemain, lui, employé de longue date d’une ONG, repartira pour la Belgique, sans perspective d’une nouvelle affectation en Iran.

Ce sera bien un dernier souper, mais d’une autre manière. Le hall sonne une demi-heure avant minuit : quelqu’un est là pour vous. Quelques instants plus tard, six personnes se précipitent.

« Ils ont isolé Olivier dans la salle de bain et l’ont poussé à genoux », raconte celui qui a entendu cela de plusieurs personnes présentes ce soir-là. « Il a dû remettre ses téléphones, son ordinateur et son passeport. »

Ses amis obtiennent des conseils clairs : faites vos oreilles et nous nous occuperons de votre famille. Il y a tellement d’agitation que les voisins appellent la police, mais ils ne se présentent qu’après l’enlèvement d’Olivier, sans mandat.

Le lendemain, la famille et les amis d’Olivier, ainsi que le gouvernement belge, apprennent qu’Olivier a été emprisonné. 455 jours de captivité commencent, le plus souvent à l’isolement, sans matelas, sans chaise, dans une lumière qui brûle jour et nuit.

Attaque déjouée

Mais cet enfer a en fait commencé plus tôt, le 30 juin 2018. Ensuite, la justice, ainsi que les services de police et de sécurité nationaux et étrangers, ont réussi à déjouer un attentat contre un grand meeting du groupe d’opposition iranien CNRI dans une salle de Villepinte, près de Paris. .

La police peut arrêter quatre Iraniens en flagrant délit, dont le meneur. Assadollah Assadi est censé être un diplomate de l’ambassade d’Iran à Vienne, mais il travaille pour l’agence de renseignement iranienne MOIS. En février 2021, le tribunal de notre pays l’a condamné à 20 ans de prison pour tentative de meurtre terroriste et sa participation à un groupe terroriste.

Immédiatement, l’Iran lance une opération pour libérer Assadi. Les trois autres Iraniens, eux aussi condamnés pour terrorisme, sont de moindre importance : « Depuis ce week-end de 2018, il y a des indications que la Belgique est la cible de menaces, car l’Iran a insisté pour vouloir récupérer ce diplomate présumé », indique le gouvernement.

L’Iran essaie déjà par la voie diplomatique, mais si ces tentatives échouent début 2022, l’Iran arrête Olivier Vandecasteele. C’est la tristement célèbre diplomatie des otages de la République islamique

Étonnamment, le gouvernement belge a alors opté non pour des négociations sous le radar, mais pour une approche démocratique : un traité avec l’Iran sur le transfert des détenus sera approuvé à l’hémicycle à l’été 2022.

Le CNRI, le Conseil national de la Résistance iranienne, s’y oppose aussitôt. Elle se rend compte qu’Assadi peut être libéré de cette manière, avant même que ce faux diplomate n’ait purgé ne serait-ce qu’un tiers de sa peine. La procédure devant la Cour constitutionnelle a abouti à un arrêt remarquable en mars de cette année. Après une précédente suspension, le tribunal a jugé que le traité pouvait encore être maintenu, à condition que les victimes, en l’occurrence le CNRI, soient informées de la libération d’Assadi.

Cela ne s’est pas produit. Dès jeudi soir, la police a fait sortir Assadi de sa cellule de la prison de Haren. Il repartira vendredi matin avec un vol pour Oman, qui fait la médiation entre l’Iran et la Belgique. Les deux prisonniers se sont croisés à Oman mais ne se sont pas vus.

167

Quand Assadi a été libéré, le CNRI a voulu le contester devant le tribunal, mais maintenant ils ne savaient rien. « L’arrêt de la Cour constitutionnelle est-il un bout de papier ? demande rhétoriquement leur avocat Rik Vanreusel.

Le gouvernement, cependant, se sent habilité par la constitution. Sur les conseils de constitutionnalistes comme Paul Van Orshoven, émérite de la KU Leuven, elle n’invoque délibérément pas le traité avec l’Iran, mais un article spécifique de la Constitution. L’article 167 confère au roi, et donc au gouvernement, des pouvoirs étendus pour agir dans les relations internationales. « C’est une piste différente », déclare Van Orshoven.

Mercredi, les ministres belges ont déjà signé un arrêté royal qui réglemente la remise d’Assadi à l’Iran « au vu de la menace grave, imminente et continue ». C’est une initiative qui place les victimes d’Assadi et la Chambre devant le fait accompli – et c’était déjà possible il y a un an, n’est-ce pas ? « Nous n’avons pas l’impression que du temps a été perdu », assure un chef de cabinet. «Avec le traité, nous pensions que Vandecasteele reviendrait à l’automne. Cela n’a pas fonctionné. »

L’arrêt de la Cour constitutionnelle offrait au gouvernement la possibilité d’échanger Assadi et Vandecasteele, mais le gouvernement craignait que cela n’entraîne des mois de perte de temps. Et après la suspension initiale, Vivaldi a cherché une alternative.

« Nous savions que notre compatriote était condamné à la prison et au fouet, et nous avons reçu des informations selon lesquelles une peine encore plus lourde pesait sur sa tête », raconte un autre chef de cabinet. « Ce n’est que depuis une dizaine de jours que les choses ont commencé à avancer. »

Vendredi soir, un Olivier Vandecasteele visiblement émacié atterrit à l’aéroport militaire de Melsbroek, où il est accueilli par sa famille et son meilleur ami Olivier Van Steirtegem, qui se sont battus pendant un an pour son retour. Vandecasteele est accompagné d’une équipe médicale, dont un psychologue.



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