Anne Hidalgo, maire de Paris en croisade, se lance dans les JO


Débloquez gratuitement l’Editor’s Digest

Sous un ciel bleu, la maire de Paris Anne Hidalgo s’est baignée dans la Seine cette semaine sous les applaudissements de centaines de spectateurs, dont beaucoup avaient travaillé sur le projet de plusieurs années visant à nettoyer la rivière pour les épreuves olympiques de natation.

Ce coup d’éclat a fait la une des journaux du monde entier à quelques jours de l’ouverture des Jeux, renforçant la notoriété internationale déjà élevée de la militante écologiste de 65 ans, maire depuis 2014. Elle a été réélue pour un second mandat en 2020.

Mais avant la baignade promise par Hidalgo, une campagne sur les réseaux sociaux s’est propagée sous le hashtag #jechiedanslaseine (« je fais caca dans la Seine »), les internautes s’engageant à déféquer pour exprimer leur mécontentement envers la maire et sa politique. « Ils nous ont mis dans la merde, alors maintenant c’est à eux de nager dans notre merde », pouvait-on lire sur un message dédié. site web.

Cette campagne a mis en évidence la haine souvent immodérée que la maire socialiste inspire à certains Parisiens, qui s’insurgent contre sa réduction drastique du trafic automobile et l’instauration d’un encadrement des loyers. La première femme maire de Paris figure parmi les hommes politiques les moins populaires du pays (un récent sondage a montré un taux de désapprobation de 70 %) et sa candidature à la présidentielle de 2022 a été catastrophique.

Mais Hidalgo a ri de la campagne contre les excréments, selon des personnes qui travaillent pour elle, et s’est montrée radieuse après avoir effectué une nage en toute confiance dans la Seine. Le gouvernement français a dépensé environ 1,4 milliard d’euros pour moderniser les infrastructures afin d’accueillir les épreuves olympiques de triathlon et de marathon de natation dans la Seine.

« C’était un rêve et maintenant c’est une réalité », a-t-elle déclaré. « Après les Jeux, nous proposerons à tous les Parisiens de se baigner dans la Seine. »

Pierre Rabadan, ancien joueur de rugby professionnel et conseiller sportif de la présidente, affirme ne jamais l’avoir vue exprimer publiquement ses sentiments à l’égard de cette affaire. « Dans le monde dur de la politique, si vous faites preuve de faiblesse, les gens exploitent la moindre faille dans votre armure, observe-t-il. Elle est combative, un peu comme une lutteuse, et très déterminée à aller jusqu’au bout de ses idées. »

Les projecteurs seront désormais braqués sur Hidalgo et Paris, qui accueillera une version ambitieuse mais risquée des Jeux olympiques. L’un des risques sera la cérémonie d’ouverture extravagante, avec des athlètes sur une armada de bateaux, qu’un expert en sécurité a qualifié de « folie criminelle » car impossible à contrôler.

La capitale française souhaite également organiser des Jeux olympiques plus durables et plus abordables : afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, seules deux arènes ont été construites. La plupart des épreuves se dérouleront dans des sites temporaires situés dans des monuments historiques du centre-ville, ce qui entraînera des perturbations majeures pour les habitants.

La double mission d’Hidalgo en tant que maire a été de donner à Paris une transformation verte radicale et de maintenir la ville accessible aux personnes à revenus moyens et faibles en investissant des milliards dans le logement social, souvent en achetant des propriétés et en les convertissant.

Son dévouement à la cause verte l’a rendue célèbre à l’étranger, où elle est plus respectée lors de ses apparitions aux conférences sur le climat de l’ONU et de la COP, que dans son pays, où elle est critiquée pour sa mauvaise gestion des villes et ses finances publiques dégradées.

Née près de Cadix, en Espagne, d’un père électricien et d’une mère couturière, Hidalgo s’installe à Lyon alors qu’elle est enfant et devient citoyenne française à l’adolescence. Son premier emploi est celui d’inspectrice du travail pour le gouvernement.

Sociale-démocrate convaincue, elle s’est lancée en politique au milieu des années 1990 comme conseillère de différents ministres au niveau national. En 2001, elle est élue sur une liste socialiste au conseil municipal de Paris dans le 15e arrondissement, rive gauche, où elle réside toujours. Elle a longtemps été la numéro deux de son prédécesseur à la mairie socialiste Bertrand Delanoë, à qui elle a succédé en 2014.

L’attitude à son égard s’est durcie chez certains Parisiens en 2016, lorsqu’elle a supprimé une autoroute longeant la Seine et transformé les quais en une zone piétonne verdoyante désormais appréciée des cyclistes et des personnes en déplacement pour courir ou se promener.

« Elle a eu des politiques très extrêmes contre les automobilistes et, par extension, contre les habitants des banlieues », a déclaré Pierre Chasseray, du groupe de pression pro-voiture. 40 millions d’automobilistes (40mn de chauffeurs).

La ville a récemment construit 1 500 km de pistes cyclables, augmenté les prix du stationnement pour les SUV et interdit les voitures sur les grandes artères comme la rue de Rivoli, les réservant principalement aux cyclistes.

A la mairie, où elle est en coalition avec les Verts et les communistes, Hidalgo a « la réputation d’être colérique », estime le conseiller vert Alexandre Florentin, qui dit pourtant l’admirer. Elle s’indigne de toute allusion au fait qu’elle ne soit pas « la maire la plus écolo que la planète ait jamais connue ».

Les associations de défense de l’environnement ont reproché à Hidalgo et aux organisateurs des JO de faire du « greenwashing » en prétendant minimiser les déchets alors qu’ils sont sponsorisés par la société de boissons Coca-Cola, un important producteur de plastique. Sa rivale acharnée au conseil municipal, la députée de droite Rachida Dati, l’a accusée d’avoir gaspillé l’argent public dans le scandale dit du Tahiti Gate l’année dernière, lorsqu’elle s’est rendue sur place pendant une semaine pour finalement renoncer à visiter le site de compétition de surf des JO.

Mais Hidalgo reste déterminée. « S’il n’y avait pas eu les Jeux, on n’en serait pas là, dit-elle à propos de la baignade dans la Seine. Ils ont été un accélérateur qui a orienté toutes nos énergies vers un objectif. » N’en déplaise aux Parisiens.

[email protected], [email protected], [email protected]



ttn-fr-56