La BCE supprime son dividende après que la hausse des taux d’intérêt ait anéanti ses bénéfices


La Banque centrale européenne n’a réalisé aucun bénéfice pour la première fois en 15 ans en 2022 après avoir subi des dépréciations sur ses investissements obligataires, les analystes prédisant des années de pertes suite au renversement de ses politiques monétaires ultra-accommodantes.

Le La BCE a déclaré Jeudi, il aurait enregistré une perte annuelle de plus de 1,6 milliard d’euros s’il n’avait pas tiré sur les provisions qu’il a constituées ces dernières années pour couvrir les risques financiers, ajoutant qu’il supprimerait le dividende qu’il verse habituellement aux autorités monétaires nationales de la zone euro.

Ces dividendes, qui s’élèvent à 5,8 milliards d’euros depuis 2018, sont généralement répercutés par les banques centrales nationales sur les gouvernements de la zone euro. Certaines banques centrales nationales, dont celles des Pays-Bas et de Belgique, ont averti leurs gouvernements qu’elles s’attendaient à subir des pertes importantes.

Les pertes de la BCE et d’autres banques centrales devraient relancer le débat sur un assouplissement monétaire agressif.

Depuis la crise financière mondiale, les régulateurs de taux du monde entier ont acheté de grandes quantités d’obligations à des coûts très élevés pour contrer la faible inflation et les risques financiers, mais commencent maintenant à réduire leurs bilans.

À mesure que les taux montent, les intérêts payés par les banques centrales sur les réserves des prêteurs commerciaux devraient dépasser les intérêts perçus sur les obligations achetées dans le cadre des programmes de lutte contre la crise.

Daniel Gros, membre du groupe de réflexion du Center for European Policy Studies, a estimé que les banques centrales de la zone euro, y compris la BCE, pourraient subir environ 600 milliards d’euros de pertes sur leurs investissements en obligations d’État, si les taux d’intérêt montaient à 3% et y restaient pendant six ans.

Le taux de dépôt de référence de la banque est passé de moins 0,5 % en juillet dernier à 2,5 %. Les responsables de la tarification ont laissé entendre qu’il atteindrait 3 % en mars.

« Le pari de la BCE que les taux d’intérêt resteraient bas se retourne maintenant contre lui », a déclaré Gros. Les critiques profiteront probablement des pertes pour soutenir les contestations judiciaires contre le programme d’achat d’obligations de la BCE, une affaire étant toujours pendante devant la Cour constitutionnelle allemande.

La plupart des analystes pensent que ces manques à gagner ne devraient pas avoir d’importance car les banques centrales ne visent pas à faire des profits et ne peuvent pas faire faillite lorsqu’elles ont le pouvoir d’imprimer de l’argent, en tirant des revenus de la production de monnaie grâce à un processus appelé seigneuriage.

« Les pertes de la BCE ne devraient avoir pratiquement aucun impact sur la conduite de la politique monétaire à moins que cela ne devienne un problème politique », a déclaré Frederik Ducrozet, responsable de la recherche macroéconomique chez Pictet Wealth Management, ajoutant que certains parlements pourraient demander la recapitalisation des banques centrales.

Ducrozet a estimé que la BCE subirait 90 milliards d’euros de pertes en raison de l’inadéquation entre les intérêts plus élevés qu’elle verse aux banques centrales nationales et les intérêts qu’elle gagne sur les obligations en 2023 et à nouveau en 2024. L’ampleur des pertes serait moindre si elle abaissait les taux l’année prochaine .

La BCE n’a pas encore effectué de dépréciation sur la valeur des 4,9 milliards d’euros d’obligations qu’elle et les banques centrales nationales ont achetées dans le cadre de son programme de QE, malgré la forte baisse de la valeur de la dette publique l’année dernière. La banque n’évalue pas ces obligations au prix du marché. Au lieu de cela, il les évalue au coût, soumis à un test de dépréciation annuel.

L’institution basée à Francfort a constitué d’importants coussins qu’elle peut utiliser pour absorber les pertes futures, notamment ses 6,6 milliards d’euros de provisions, 8,9 milliards d’euros de capital et 36 milliards d’euros de comptes de réévaluation provenant de plus-values ​​latentes sur investissements.

La dernière fois que la BCE n’a réalisé aucun profit et n’a distribué aucun dividende aux banques centrales nationales qui sont ses actionnaires, c’était en 2007. Sa dernière perte annuelle remonte à 2004, lorsqu’elle a été touchée par des pertes de change dues à l’appréciation rapide de l’euro.



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