« Si tu avais tout ce que tu voulais, en voudrais-tu plus ? / Est-ce que je continuerais à me battre s’il n’y avait plus rien pour lequel me battre ? / Parfois j’ai l’impression de m’enfoncer dans des sables mouvants », témoigne Hatchie dans « Quicksand », l’un des morceaux les plus éblouissants de son deuxième album « Giving the World Away ». Ces réflexions douces-amères montrent un côté plus mature de leurs paroles que ce que nous avons entendu jusqu’à présent. Grandir, c’est aussi s’interroger sur la raison de tout cela, s’il y a vraiment un intérêt à poursuivre un rêve quand rien ne semble avoir beaucoup de sens.

La production qui accompagne la chanson, et la plupart de ce travail en général, parie sur la musique dance des années 90, baggy et néo-psychédélique d’une manière que Hatchie n’avait pas approchée auparavant. Dans ‘Giving the World Away’, nous trouvons certaines des chansons les plus euphoriques de Hatchie, ainsi que ses paroles les plus sombres.

Ce n’est pas que la base shoegaze sur laquelle reposait sa musique ait disparu, mais plutôt qu’elle a évolué. Il n’y a pas autant de dream pop sucrée – bien qu’il y en ait un peu – de ‘Sugar & Spice’, leur premier EP prometteur, que de la pop jangle ou des textures de danse alternative qui ont été intuitionnées dans le plus proche de la guitare ‘ Keepsake’, sa première longueur irrégulière. Ici, il continue d’explorer ces voies, mais aussi de se lancer dans une recherche de nouveaux sons et de nouvelles textures.

Dans celui-ci, il y a des moments où il se perd, conduisant à des moments qui, bien qu’agréables à écouter, n’ajoutent rien de particulièrement mémorable à la séquence. En fait, la majorité de l’album reste dans une veine plutôt monotone, où la production semble sur le point d’atteindre des points vraiment excitants qui, finalement, échouent à les atteindre. Des chansons comme ‘Twin’, ‘The Key’ ou la chanson-titre ne décollent jamais vraiment malgré leurs belles mélodies et leurs idées intéressantes.

Cependant, quand il décolle, il vole très haut. L’album démarre remarquablement avec la dream pop contagieuse de ‘Lights On’, une production sophistiquée qui montre jusqu’où l’Australienne peut aller quand les choses vont bien pour elle. Il est suivi de l’entêtant ‘This Enchanted’, le premier single de l’album et l’une des meilleures chansons de l’année écoulée. Le « Quicksand » susmentionné offre l’un des meilleurs refrains qu’il ait jamais signés et possède un pont instrumental électronique et irrésistible. ‘The Rhythm’, où l’on perçoit une nette influence stéphanoise et new-order, est un peu moins ronde, mais tout aussi admirable dans sa volonté créative, mêlant la douceur mélodique de la maison à une production agressive.

Dans ‘Giving the World Away’, quelques excellents aperçus coexistent avec plusieurs passages dans lesquels plus d’inspiration manque. Hatchie est capable de créer des chansons convaincantes et immersives, mais il ne maîtrise toujours pas complètement la forme longue. Malgré le fait que son style soit caractéristique et personnel, il semble qu’il n’ait pas encore fini de se trouver en tant qu’artiste. Et bien que ce ne soit pas toujours satisfaisant, il y a quelque chose de beau à voir un chanteur se chercher, essayer de nouvelles choses, parfois réussir et parfois échouer. Dans ce deuxième album il y a de belles idées, une vocation artistique, et, surtout, de quoi espérer que le prochain soit meilleur.



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