L’OMS sonne l’alarme face à la « menace croissante » des champignons : résistants, pathogènes et même mortels

Les champignons sont une menace sous-estimée et croissante pour notre santé, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Elle veut changer cela avec une liste des champignons les plus inquiétants, en fonction de leur létalité, de leur propagation et de leur progression. L’objectif est de stimuler la recherche sur le problème et le développement de nouveaux traitements.

Beaucoup de gens peuvent considérer les champignons en premier lieu comme des restes de nourriture flous oubliés, des champignons ou un « pied d’athlète » innocent. Mais les champignons peuvent tuer. Selon l’OMS, il est caractéristique du manque d’attention que l’on ne sache pas combien de victimes ils causent. Une estimation dans Nature Microbiology met 300 millions de personnes gravement malades et 1,6 million de morts chaque année. Les champignons affectent principalement les personnes souffrant d’affections sous-jacentes et d’un système immunitaire affaibli.

« C’est un signal important de l’OMS », déclare Hans Carolus, qui étudie la résistance des champignons à la KU Leuven. « Cela augmente la vigilance des médecins et permet de libérer plus facilement de l’argent pour des recherches indispensables. »

Le nombre de médicaments disponibles pour les infections fongiques est limité. « De plus en plus de champignons développent une résistance à un ou plusieurs agents », explique Carolus. Ce n’est pas seulement un manque de financement qui complique le développement de nouveaux traitements. « Contrairement aux bactéries, les champignons sont multicellulaires, tout comme nous. Ce qui est mortel pour un champignon est souvent aussi nocif pour l’homme.

La multirésistance aux médicaments est un problème particulier avec le champignon Candida auris, qui figure en tête de liste des priorités de l’OMS. « Jusqu’à 40 % des échantillons sont résistants à deux des trois classes de médicaments disponibles, et 4 % aux trois », explique Carolus. « Dans ce cas, même un traitement avec une combinaison de médicaments n’est plus efficace. Une infection entraîne la mort de 30 à 70 des patients.

C. auris est difficile à sortir une fois qu’il est entré dans un hôpital. Le champignon peut survivre pendant des semaines sur une variété de surfaces, du plastique au lin. « Un hôpital de Brooklyn a dû casser le faux plafond et le sol d’une chambre d’un patient décédé pour se débarrasser du champignon », explique Carolus. « Tout comme les ‘bactéries hospitalières’ à résistances multiples causent des problèmes, Candida auris est le premier véritable ‘champignon hospitalier’. »

En 2009, des scientifiques japonais ont isolé pour la première fois le champignon de l’oreille d’une femme de 70 ans. Depuis lors, il a été trouvé partout dans le monde. Contrairement à d’autres champignons, Candida auris ne se produit pas naturellement sur ou dans notre corps. « Une hypothèse est que le champignon s’est adapté aux températures élevées pendant les périodes chaudes et a ainsi pu faire le saut vers l’homme », explique Carolus.

Complications avec le Covid-19

Jusqu’à présent, 7 infections à C. auris ont été détectées dans notre pays. « Cinq cas concernaient des patients étrangers », explique Katrien Lagrou, qui dirige le laboratoire national de référence pour les infections fongiques à l’UZ Leuven. « Mais dans deux cas récents, il n’y avait aucun lien avec des pays étrangers. Cela indique que ce champignon prend également pied en nous.

Jusqu’à nouvel ordre, c’est surtout Aspergillus fumigatus qui cause des problèmes dans nos hôpitaux, un champignon présent partout dans la nature et dont nous inhalons les spores. « Le champignon provoque des complications chez environ 1 patient sur 5 qui se retrouve en soins intensifs avec la grippe, puis double le risque de décès », explique Lagrou. « Cela affecte également environ 15% des patients Covid-19 en soins intensifs. »

Selon l’OMS, la résistance à Aspergillus fumigatus est en partie due à l’utilisation d’agents antifongiques en agriculture. « Actuellement, moins de dix pour cent des échantillons de notre pays sont résistants au traitement actuel », explique Lagrou. « Si ce pourcentage augmente, nous aurons de vrais problèmes. Il n’est donc pas trop tôt pour y prêter une attention particulière.



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