CAra Ester, j’ai 30 ans et un rocher dans mon cœur. Il y a quelques nuits, le garçon avec qui je sortais depuis sept mois m’en a dit assez sur un banc de parc, en plein milieu de couples se promenant avec des enfants et de messieurs promenant leurs chiens.
je te résume. C’est le soir du réveillon de Noël et je le rencontre, par hasard, dans un bar. Pour moi c’est coup de foudre, en sept secondes je suis déjà amoureux. Il est grand, beau et désiré de tous. Eh bien oui, même moi, qui ai toujours privilégié la carrière, et le master et le troisième degré, je me prélasse dans celui qui est inaccessible.
C’est un séparé. 38 ans, aussi cool que dépressif. Un de ceux avec un rocher dans la tête en gros. La le vrai problème c’est que c’est beau. Il traverse la ville sur son vélo de course, arrive chez moi et ne fait que m’embrasser de ses lèvres douces et de son parfum musqué. Mais quand il a fini, il fait l’erreur d’ouvrir la bouche et de vomir sur moi tous ses traumatismes passés. En effet non, le son traumatisme passé.
Sa femme l’a quitté il y a deux ans. Elle est partie avec quelqu’un d’autre après dix ans de mariage. Et à partir de ce moment les séparations commencèrent pour de bon. Vous gardez le mixeur. Je vais prendre les meubles de la chambre. Il m’a tout dit. Elle était belle, très bonne, une “sainte femme” selon lui.
Au début il m’a demandé de se voir tous les soirs et j’ai toujours dit oui, ce sera aussi pour récupérer les mois d’abstinence pandémique. Il répétait toujours qu’il n’y avait pas que du sexe et qu’on sortait aussi dîner. Les mois se sont pourtant succédé avec de nombreuses crises pour l’ex et des critiques à mon égard, il était clair qu’il n’était pas du tout amoureux. Par contre il y avait moi qui cachais les notes de Private Law avant qu’il n’arrive chez moi pour me mettre dans la cuisine pour cuisiner du risotto, jamais cuisiné de ma vie pour autre chose, non seulement du risotto mais absolument rien et ça il m’a mangé aussi les pieds de la table. je me suis adapté.
Un soir, il m’a dit : “Mais si un homme avec qui tu traînes te disait assez, tu ferais quoi ?” “Je l’oublierais” répondis-je. En fin de compte, nous y sommes arrivés, mais ce n’est pas comme si j’abandonnais vraiment.
L’autre nuit sur le banc du parc il m’a dit qu’il m’aimait bien, mais 95% et moi 95% me veulent, je ne le veux pas. Le plus absurde, c’est qu’il veut rester en bons termes, sortir de temps en temps pour prendre l’apéro parce qu’il ne sait pas ce qui va se passer, il peut retourner avec son ex-femme ou peut-être me revoir. En fait, depuis ce soir-là, il m’écrit encore malgré le fait que je lui ai dit que je ne voulais plus jamais le revoir. Que fais-je? je lui réponds. Je gratte le fond du baril, je sais, mais je ne sors pas.
Merci
RÉ.
La réponse d’Ester Viola
Cher D.,
Parfois, j’aimerais être le plombier, l’électricien des relations électrocutées au lieu du bavard. Faites quelque chose à la place de ce rien alphabétique.
“Des garanties pour personne”, voilà la définition de l’amour, RÉ.
Estime de soi et humiliation
Qu’y a-t-il de détestable dans tous les amours désespérés, finis ou non partagés ? Ce n’est pas de la douleur, c’est de l’humiliation : l’amour malheureux c’est quelqu’un qui te donne le certificat « tu es secondaire dans ma vie ». Vient ensuite la commisération, le deuil sans fin, l’auto-punition avec les trois, du cul affaissé à la vivacité d’esprit et la capacité de divertir et de s’amuser du dîner à deux heures du matin.
Et puis on tombe dans le piège de « chercher à comprendre ». Le plan de secours pour vivre est à réfléchir : le temps perdu est fait de la même substance que “comment est-ce possible” alterné avec “où ai-je mal tourné”.
Faible estime de soi, compulsion à répéter
La partie la plus décourageante d’être amoureux, c’est quand vous comprenez que les solutions existent, mais qu’elles sont toutes fictives. Il n’y a pas de pilule de la résignation, il n’y a pas de pilule de confiance à chaque “tu dois recommencer” qu’il faut s’infliger, il n’y a pas de pilule pour aller plus loin et pas même la pilule pour dire “qu’est-ce que je m’en fous ?” ” sur commande. Et il n’y a pas la tablette qui serait plus utile : tomber amoureux d’un autre, après-demain. “Traverser” est une convalescence solitaire. Vous êtes le médecin, le remède et le mal.
Et n’oublions pas l’absurdité sentimentale lors du désir de répétition : « Puisque nous aimons la défaite » écrit Flaiano « continuons ». Obligé de répéter, disent les spécialistes du cerveau.
Comment s’en sortir
Surtout jel’avenir demande de la patienceD., beaucoup plus que de l’enthousiasme. Exercice sans répit d’adaptation aux nouveautés. Profitez de ce qui vous arrive. C’est tout, depuis votre naissance jusqu’à votre mort (avec beaucoup de littérature entre les deux).
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