NonIl n’y a pas de famille sans secrets, qu’elle soit petite ou grande. Mais l’histoire que raconte l’écrivaine australienne Kate Morton dans Retour à la maison tourne autour d’une histoire cachée qui pèse comme un rocher.
C’est la veille de Noël 1959. Sur le domaine Halcyon, un manoir de style victorien doté d’un jardin enchanteur qui contraste avec la brousse aride qui l’entoure, Isabel Turner et ses quatre enfants – Evie, John, Matilda et la nouveau-née Thea – sont sortis pique-niquer. Son mari Thomas est en voyage d’affaires. Nora, la jeune belle-sœur d’Isabel, est restée à la maison, fatiguée par la grossesse et la chaleur torride du mois de décembre australien.
Quelques heures plus tard, un homme du village voisin, Percy Summers, de passage dans la propriété, retrouve les corps d’Isabel et de ses enfants allongés sur la pelouse, comme pris dans un sommeil soudain.. En réalité ils sont tous morts, sauf la petite Théa, qui a disparu du berceau.
Près de soixante ans plus tard, jeJessica Turner-Bridges, quarante ans, monte à bord d’un avion qui la emmènera de Londres, où elle vit, à Sydney.. La grand-mère âgée Nora s’est retrouvée à l’hôpital après une mauvaise chute. Sa nièce Jess est frappée par quelques phrases apparemment dénuées de sens que Nora prononce dans un état de confusion, dans lesquelles elle évoque Halcyon, sa belle-sœur Isabel et une petite fille qu’on veut lui enlever. Qui peut vous éclaircir le mystère ? Pas sa mère Polly, avec qui elle n’a aucun contact après l’avoir confiée à sa grand-mère lorsqu’elle était enfant. Et il n’y a pas d’hommes dans cette famille. La nièce, journaliste, se lance dans l’enquête et tombe sur un livre sur les événements de 1959…
Dans un crescendo de tension, Jess fera la lumière sur la mort mystérieuse de la riche famille de Thomas Turnersur les secrets d’Isabel et Nora, sur les manipulations de la grand-mère sur sa fille et sa petite-fille. Jusqu’à ce que la vérité éclate. Kate Morton, 49 ans, mariée à Davin, pianiste de jazz et mère de trois garçons, est une véritable championne de la littérature : depuis la sortie de son premier livre en Australie en 2006, il s’est vendu à plus de 16 millions d’exemplaires dans le monde. Homecoming est son septième roman. «En mars 2020», raconte-t-il, «j’étais en Europe et je travaillais sur un manuscrit très différent. Lorsque la pandémie a frappé, nous sommes retournés en Australie. Nous pensions que ce serait pour une courte période, mais nous sommes restés plus longtemps que prévu. Me retrouvant entouré de ma famille élargie, j’ai commencé à réfléchir à ce que signifiait « rentrer à la maison ». Il était impératif pour moi d’écrire sur ces lieux. »
Dans le livre, le manoir d’Halcyon est un véritable personnage. Qu’est-ce qui l’a inspiré ?
«J’aime les maisons : ce sont des dépositaires de souvenirs, des lieux où les gens vivent leur vie. Lorsque j’ai commencé ce livre, j’ai visité Martindale Hall en Australie du Sud. Cela m’a fait vibrer : un bâtiment de style géorgien, étrangement déplacé dans le paysage aride australien. »
Dès le début, Nora est la lionne de l’histoire, riche et confiante. C’est elle qui aide Jessica à croire en elle. Mais la grand-mère parfaite cache un secret…
«Toutes les familles ont un gardien de la «vérité». Dans Homecoming, Jessica et Polly se construisent elles-mêmes et construisent leurs perceptions l’une de l’autre en fonction des histoires racontées par Nora et aussi de celles qu’elle cache. Je suis fasciné par l’idée que le passé puisse hanter le présent. Les secrets se révèlent, même si vous essayez de les garder cachés. »
Jessica, Isabelle, Polly, Nora. Dans lequel de ces personnages féminins y a-t-il quelque chose d’elle ?
« Ritorno a casa est un livre sur les relations entre femmes. Il y a quelque chose de moi dans tous les personnages cités. Comme Isabel et Jess, je considère la « maison » plus qu’un lieu. Avec Jess je partage un retour inattendu en Australie. Je me suis appuyé sur mon expérience pour décrire les réflexions de Jess sur le foyer et l’appartenance, ainsi que sur les difficultés de vivre loin de sa famille. »
Elle écrit : « La maison n’était pas un lieu, un moment ou une personne, même si cela pouvait être toutes ces choses ensemble (…) La maison était une sensation, un sentiment de plénitude (…) ne plus se sentir seule ».
«Je pense que la plupart des écrivains ont un thème récurrent, le mien est la maison. Résoudre un mystère familial est en soi une façon de rentrer chez soi. Mes personnages recherchent, et trouvent souvent, l’ordre dans le désordre, le confort dans un lieu isolé et la lumière dans les coins sombres. Quant à moi, la maison, ce sont les quartiers et les immeubles où j’ai vécu, le temps passé avec ma famille et mes amis. Mais même le fait de lire est pour moi un retour aux sources. Depuis toute petite, j’adore me perdre dans un autre monde évoqué par les pages, c’est un grand réconfort. »
La famille est au centre de l’histoire de ce livre. Pouvez-vous échapper à vos racines ?
«Je ne sais pas si j’écrirais un jour un roman où la famille n’a pas un rôle central. J’aime explorer l’intersection du présent et du passé, et l’une des façons de le voir est dans un contexte où les gens sont liés par des histoires et des secrets qui définissent leur relation. Les familles offrent aussi le scénario idéal pour analyser les grands thèmes de la vie : l’amour, l’envie, l’orgueil, la trahison, la vérité et le mensonge.
Sur son site Internet, faisant référence à la tradition orale aborigène, il écrit que l’Australie abrite des conteurs depuis des milliers d’années…
« Les histoires autochtones ont été transmises de génération en génération pendant des dizaines de milliers d’années afin de préserver les connaissances. C’est une tradition orale, mais aujourd’hui, beaucoup de ces histoires sont publiées, et il existe des écrivains autochtones australiens, comme Tara June Winch, Melissa Lucaschenko et Alexis Wright. »
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