NonIls n’avaient aucun droit, ils n’avaient pas de voix, mais ils pouvaient désormais enfin sortir leur corps de la maison. Montrez-leur, devant des milliers de personnes, des muscles et des fibres en action pour s’étendre dans l’espace. C’est ce que ça signifiait participer aux Jeux Olympiques. Pas une bataille de principe – qui sont alors justes et sacro-saints – mais un vrai combat pour l’émancipation à partir du corps et de sa présentation publique.

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JO, la longue marche des athlètes

Tout a commencé quelques milliers d’années plus tôt, en 776 avant JC, à Olympie, où se sont déroulés les premiers Jeux de l’histoire. L’archétype de l’athlète était l’homme libre, fort et héroïque. Les femmes n’étaient pas autorisées à concourir ni même à regarder. Au fil des siècles, les arguments pour justifier cette interdiction se sont peu à peu affinés et l’insinuation perfide selon laquelle le sport façonnerait virilement les corps sinueux au détriment d’une féminité délicate et passive tandis que le sport de compétition mettrait en valeur les gestes et les mouvements maladroits a survécu pendant plus de deux ans. des millénaires.

Le corps des femmes – sacré ou impur au gré des dogmes sexistes – qui a toujours été un objet de propriété du patriarcat, a dû relever ce défi pour une véritable légitimation. Il l’a bien compris Alice Milliat, responsable sportive française qui en 1922, las des discriminations, demanda à Pierre De Coubertin, fondateur des Jeux Olympiques modernes, d’admettre les femmes. Face à son refus, des Jeux olympiques réservés aux femmes ont été inventés. Ce qu’ils ne nous donnent pas, nous le prenons, nous l’aurions dit plusieurs décennies plus tard. Avec détermination, En quelques années seulement, Milliat obtient l’admission des femmes aux Jeux, officialisée dans l’édition d’Amsterdam de 1928.

Les femmes aux JO, une réussite féministe

Enfin nous nous sommes mesurés dans le dépassement des limites, dans l’effort et la compétition, dans l’esprit d’équipe et dans l’aspiration à l’héroïsme, qui a toujours été une prérogative masculine. Le corps s’exprime dans l’espace, la perception de soi par rapport à l’extérieur change. Nous avons tous une dette importante envers le féminisme. Entre autres choses, cela nous a libéré de ce cliché qui dit : « Ce n’est pas pour les femmes ». A partir des années 70 plus personne n’osait le dire. Mais, consciemment ou non, c’est précisément l’accès des femmes aux Jeux olympiques qui a déclenché la démolition de cet impératif.

Jeux Olympiques de Moscou 1980 : la championne olympique Sara Simeoni (Photo de Walter L. Keller/RDB/ullstein bild via Getty Images)

Tandis que la marche des athlètes conquérait les terrains et les circuits, la libération s’est étendue aux pays les plus répressifs envers les femmes, l’Iran des ayatollahs et le Qatar des cheikhs.
Comme le dit le mouvement féministe et transféministe « Pas un de moins », nous sommes la marée et l’eau, comme nous le savons, est imparable.

Jeux olympiques de Londres 2012. La marche des femmes vers l’égalité des sexes fait un petit pas : le Qatar brise l’interdiction et amène des athlètes féminines aux Jeux olympiques. Le Qatarien Noor Hussain Al-Malki sera blessé, mais il a franchi une autre barrière. (Photo d’Alexander Hassenstein/Getty Images)

Si autant de femmes que d’hommes concouraient à Paris 2024le thème du genre a été dédouané à Tokyo 2020 : le choix d’appartenir ou non à son identité biologique ou de la changer ou d’accepter sa fluiditédes questions nouvelles mais qui concernent toujours ce que nous avons écrit sur le corps.

Cent ans de défis sur et en dehors du terrain, c’est l’histoire des femmes qui est l’histoire du monde. Souvent, nous ne le savons pas parce qu’on ne nous l’a pas dit, et encore moins montré. Ainsi, pour retrouver le récit de cette épopée, on confie la tâche de mémoire à la photographie, preuve d’existence, témoin de la réalité.

Parce que l’histoire sans icônes n’est presque pas de l’histoire.

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