Les partis français sont engagés dans d’intenses négociations pour former un gouvernement après que les électeurs ont élu la semaine dernière le parlement le plus divisé de l’histoire d’après-guerre du pays.

Le président Emmanuel Macron a appelé à un « pacte de gouvernement » large qui exclurait l’extrême droite et l’extrême gauche La France Insoumise (LFI).

Le Nouveau Front populaire (NFP), dont fait partie LFI, a jusqu’à présent résisté aux tentatives des centristes de Macron de se débarrasser de ses membres les plus modérés. Le NFP revendique son droit au poste de Premier ministre après être arrivé en tête lors du scrutin de dimanche, avec 180 sièges sur 577 à l’Assemblée. Jeudi, les partis du NFP se disputaient toujours le poste de Premier ministre.

L’alliance centriste Ensemble de Macron est également divisée sur la stratégie à suivre, certains poussant à un accord avec les politiciens conservateurs.

Le président français désigne le Premier ministre, mais la Constitution ne précise pas comment, ni ne fixe de calendrier.

Voici quelques prétendants au poste de Premier ministre :


Olivier Faure, NFP

Calme et discret, le chef du Parti socialiste (centre-gauche) Olivier Faure est facile à sous-estimer. Mais l’homme de 55 ans s’est révélé un habile tacticien, parvenant à redonner à son parti autrefois moribond une santé fragile – et à tripler le nombre de ses députés par rapport aux élections de 2022.

Faure a contribué à forger l’alliance du NFP juste avant les élections anticipées convoquées par Macron le mois dernier. Il a également été le co-architecte de la coalition Nupes avec LFI et d’autres partis de gauche lors de l’assemblée précédente.

Faure serait un candidat sûr, compte tenu de ses décennies d’expérience en politique locale et nationale, et il est plus modéré que d’autres membres du NFP. L’alliance de gauche a insisté sur le fait qu’elle appliquerait son programme de taxation et de dépenses lourdes et abrogerait la réforme phare des retraites de Macron, mais Faure pourrait se montrer malléable en tant que Premier ministre.

« Je suis prêt à assumer ce rôle », a déclaré Faure mardi.

Marine Tondelier, OBNL

Marine Tondelier

Marine Tondelier, cheffe des Verts, est connue pour porter souvent une veste aux couleurs de son parti. Elle est devenue une actrice clé du NFP, faisant le pont entre Faure et les politiciens d’extrême gauche.

Cette femme de 37 ans, qui a fait ses armes en politique à Hénin-Beaumont, dans le nord du pays, s’est fait remarquer par ses apparitions télévisées percutantes et ses discours passionnés contre l’extrême droite.

Mais elle n’a que peu d’expérience au sein du gouvernement national et n’est pas considérée comme une candidate sûre pour ce poste. Son élection pourrait être facilitée par le fait qu’elle ne soit pas issue des deux plus grands partis du NFP – LFI et PS – qui se disputent et se concurrencent fréquemment.

Selon Mme Tondelier, de nombreuses personnes au sein du NFP possèdent « l’expérience et les compétences » nécessaires pour ce poste. « Il y a même des femmes qui répondent à ces critères », a-t-elle déclaré, indiquant ainsi son ouverture à ce poste.

Gérald Darmanin, Ensemble

Gérald Darmanin

Ministre depuis le début du premier mandat d’Emmanuel Macron en 2017, et en charge du difficile portefeuille de l’Intérieur qui inclut la police depuis quatre ans, Gérald Darmanin, 41 ans, convoite depuis longtemps le poste de Premier ministre.

Né de parents d’origine algérienne et maltaise, issu de la classe ouvrière, Darmanin a débuté sa carrière au sein du parti conservateur Les Républicains (LR) et est l’une des principales figures de droite du camp d’Emmanuel Macron. Réélu député d’une circonscription du Nord, il est connu pour son attitude sécuritaire. Il a fait face à des crises, notamment aux émeutes de l’été dernier après que la police a tiré sur un jeune de 17 ans d’origine maghrébine.

Darmanin a ouvertement plaidé pour que l’alliance centriste de Macron s’allie aux LR et a jeté un froid sur l’idée d’un gouvernement de gauche du NFP. Il a récemment déclaré qu’il serait le « premier à signer » une motion de censure contre un gouvernement qui inclurait LFI ou les Verts.

François Bayrou, Ensemble

François Bayrou

François Bayrou, l’un des premiers alliés d’Emmanuel Macron, a défendu un centrisme modéré tout au long de sa carrière politique. Agé de 73 ans, il est aujourd’hui maire de Pau, dans sa région natale du sud-ouest de la France. Il dirige le parti Modem, membre de l’alliance du président, Ensemble.

Social-démocrate classique, Bayrou a défendu de telles politiques au sein de « l’aile gauche » du camp de Macron et a cherché à contrer le glissement progressif du président vers la droite sur des questions comme la sécurité et la culture.

Le Modem de Bayrou a perdu 33 sièges au Parlement, contre 48 en 2022. Mais il s’est empressé ces derniers jours de contrer des figures de la « droite » du camp de Macron, comme Darmanin, qui prônent de se tourner vers LR pour trouver des alliés.

Compte tenu du résultat ambigu des élections, Bayrou a récemment déclaré que ce serait une grave erreur de créer un gouvernement qui « ne servirait qu’une moitié du pays contre l’autre ».

Xavier Bertrand, Les Républicains

Xavier Bertrand

Xavier Bertrand, 59 ans, est le chef de la région Hauts-de-France et ancien ministre de la Santé et du Travail sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Il se distingue au sein de LR par sa volonté de mettre davantage l’accent sur la classe ouvrière, en améliorant les services publics et les dépenses sociales.

Bertrand a temporairement quitté les LR en 2017 lorsqu’un rival plus conservateur, Laurent Wauquiez, est devenu chef du parti, et est revenu au bercail en 2022 lorsqu’il s’est présenté sans succès à l’élection présidentielle.

Bertrand a utilisé son puissant perchoir régional pour critiquer Macron — s’opposant à son impopulaire relèvement de l’âge de la retraite — et a été un farouche opposant au RN d’extrême droite, fort dans sa région.

Mais Bertrand a reconnu que Macron l’avait sondé pour diriger le gouvernement en 2017.

Comme d’autres dirigeants de LR, Bertrand a affirmé sans détour que le gouvernement serait dirigé par un membre de son parti. « Il faut qu’il soit dirigé par un membre de LR pour qu’il y ait du changement dans ce pays », a-t-il déclaré mardi.

Un technocrate mystérieux

Un technocrate mystérieux

Macron a joué la montre cette semaine en maintenant en place le gouvernement actuel du Premier ministre Gabriel Attal pendant que les négociations se déroulent.

Si aucun gouvernement ne parvient à se former, Attal pourrait rester en poste pendant un an, jusqu’à ce que de nouvelles élections anticipées soient convoquées. Attal a pourtant laissé entendre qu’il souhaitait quitter le pouvoir dès la semaine prochaine pour prendre son siège de député et diriger le groupe parlementaire du parti Renaissance de Macron.

Si Macron se trouve dans une impasse, il pourrait choisir un gouvernement technocratique qui résistera à une motion de censure. Ce serait une première dans la France moderne.

Un gouvernement technocratique aurait une capacité d’action plus limitée, il ne faut donc pas s’attendre à des réformes majeures.



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